Tu n’as pas confiance en Jean-Eude. Principalement, parce que Biskit n’a pas confiance en lui. Ce qui est une raison suffisante pour être méfiant à son sujet. Et aussi, parce que tu ne le connais pas vraiment. Certes, vous avez fait une pyjama party, mais c’était seulement votre deuxième rencontre, et la dernière en date. Alors tu as décidé de ne pas le prévenir que tu allais break in dans le cabinet de l’infirmière. Parce qu’il n’aurait fait que te retarder, être un poids mort—les deux fois il a été un poids mort, retardant à la fois ta réflexion et ta progression dans la découverte de l’identité de ton agresseur.

Vêtu de noir de la tête au pied, tes cheveux soigneusement tressés et collés sous un bonnet, et accompagné de ton fidèle compagnon, tu te fonds dans le paysage. Il n’y a pas grand monde dans les couloirs à une telle heure de la nuit, heureusement pour toi. Tu aurais l’air bête, sinon, à raser les murs et à marcher le plus silencieusement possible. La discrétion, c’est un peu la clé. Si tu te fais choper, tu auras du mal à expliquer ce qu’il se passe, et tu ne pourras certainement pas la jouer « je me demandais comment mon ami va ». Si tu te posais cette question, tu aurais tout simplement été voir ton ami. RIP to Mordred but you are different. Tu espères surtout ne pas croiser l’infirmière. Tu ne la jamais vue parce que tu es complètement flippé des gens comme elle. Quiconque sait se servir d’une seringue autrement que pour se faire tripper mérite ta méfiance. Le fait que tu n’utilises jamais ton pouvoir à son plein potentiel joue aussi : tu n’as jamais de contrecoups trop violents, puisque tu te contentes de l’utiliser à son plus bas niveau. Les autres en diront ce qu’ils voudront mais tu te sens plus intelligent qu’eux, sur le coup. Pas de fatigue inutile, pas de maux de tête trop violents… Maux de tête. Tu sais où tu devras commencer par chercher. Les élèves qui sont venus la voir pour maux de tête.

Tu mets quelque temps à trouver l’infirmerie. Peut être que tu aurais du partir en repérage avant l’infiltration…il est trop tard pour revenir là-dessus maintenant. Tu déposes un grain sur ta paume et lui donnes suffisamment d’énergie pour le faire grandir rapidement. Une fois qu’il atteint les quatre centimètres, tu glisses la jeune pousse dans la serrure.

- Ok, je vais avoir besoin que tu déverrouilles ça pour moi, ça marche ?

Tu laisses la plante nouveau-né puiser dans tes réserves pour se grandir encore et faire bouger les différents crans de la serrure. Tu n’étais même pas sûr que ça marcherait. Tu as choisi un plan à la tige résistante, au cas où, mais tu partais un peu défaitiste. Visiblement, tu ne t’es pas trompé. La serrure cliquette et tu peux récupérer le pousse et activer la poignée pour entrer dans l’infirmerie. Tu pousses la porte et la referme une fois entré, dans le plus grand des calmes. Tu vas devoir trouver les papiers de l’infirmière, l’endroit où elle conserve les dossiers des élèves et les archives de ses journées. Aucun moyen de deviner son système de rangement…tu commences à fouiller dans les placards.

   

Well, fuck. C’est ce qu’on appelle un échec. Un échec splendide, qui plus est. Tu aurais dû attendre trois ou quatre heures du matin pour te glisser dans son bureau. Tu lèves les mains en l’air, paumes vers l’avant. Biskit t’imite, mais tu lui fais signe de poursuivre ses recherches. Tu n’es pas certain qu’il sache lire. Mais s’il en est actuellement capable, il pourra continuer de fouiller tandis que tu déconcentreras l’infirmière, avec un mensonge bien trouvé. Maintenant, il faut trouver ledit mensonge. Avant qu’elle ne s’énerve et appelle des renforts.

Tu prends ton air le plus innocent, sourcils froncés, surpris d’avoir été surpris, et te mordilles la lèvre inférieure.

- Je sais que vous n’allez pas me croire, mais la situation est bien plus simple qu’il n’y parait. On pourrait croire que je suis en train de fouiller vos dossiers confidentiels et…en réalité, je le suis. Mais j’ai une très bonne raison de le faire ! vous comprenez, je dois faire des recherches sur un type de magie bien particulier et je ne connais aucun élève qui corresponde à cette catégorie. Je me suis dit que vous pourriez me renseigner, mais votre profession est soumise au secret médical alors… j’ai préféré ne pas vous mettre dans l’embarras, trouver un ou plusieurs élèves qui pourraient répondre à mes questions sur leurs pouvoirs.

Bon. C’est crédible. Plus ou moins. Maintenant, il ne faut pas qu’elle te demande le nom de ton prof et encore moins le nom du devoir que tu as à rendre. Tu poursuis tes conneries avec un peu plus d’assurance.

- Je n’ai pas beaucoup d’amis mages noirs, je fréquente plus des mages verts puisqu’on fait partie des mêmes clubs… mais il me semble que ce sont les mages noirs qui ont le pouvoir de créer des hallucinations, et c’est justement des élèves capables de créer des hallucination que je recherche. Mon devoir porte sur les effets de la manipulation mentale magique. J’ai besoin d’un ou deux sujets à interroger, et je ne savais pas où me tourner… mais maintenant que vous m’avez surpris… est-ce que vous pourriez me renseigner vous-mêmes ?

Tu ôtes ton bonnet et te passes une main dans les cheveux pour libérer ta tresse, et pour avoir l’air un peu plus innocent. Ce serait plus simple si tu l’avais déjà vue. Tu aurais surement pu l’amadouer en allant la voir à plusieurs reprises et en lui offrant du chocolat… mais non. Ce n’est pas vraiment le moment de penser à une autre technique d’infiltration. Celle-ci devrait marcher très bien. Tu prends un air piteux, désolé et un peu perdu. Il va falloir lui faire un peu pitié, aussi.

- Je sais que ce n’est pas une méthode de recherche très orthodoxe…ni très honnête, mais j’ai demandé à mes amis et personne n’a su m’aider… mon devoir est à rendre pour jeudi prochain et je n’ai pas pu dépasser la partie théorique…j’ai vraiment besoin de leur aide, mademoiselle… je suis désolé de m’être introduit dans votre bureau… j’avais peur de rater mon devoir… j’ai vraiment besoin d’avoir une bonne note, vous savez…

Non, elle ne sait pas, elle n’a jamais vu ta gueule, et si tu avais été plus chanceux elle ne l’aurait jamais vue du tout. Malheureusement, tu as fait le bourrin et maintenant tu l’as dans les pattes. Bien joué, Batman.

Réfléchis, Mitre. Est-ce que tu lui donnes ton nom, ou est-ce que tu inventes une connerie pour être sûr qu’elle te foute la paix ? La deuxième option est tellement plus tentante, mais aussi tellement plus risquée. Si elle te cherche dans ses dossiers et qu’elle ne trouve rien, tu seras dans la misère. Si tu donnes un nom qui existe déjà, comme celui de Jean-Eude, ou de ton coloc—paix à son âme, vraiment, mais tu la joues chacun pour soi, et qu’elle les connait, elle va vraiment t’allumer. Et si elle te colle dans la catégorie menteur pathologique, ne t’attend même pas à obtenir ce que tu es venu chercher. Non, vraiment, l’option la plus tentante est malheureusement la plus dangereuse. Tu soupires, tires un peu sur ta manche, et lèves les yeux vers elle sans croiser directement son regard.

- Je m’appelle Mitre. Mitre Nikulaenkovitch. Je peux vous l’écrire, si besoin… Je sais que mon nom est un peu compliqué à orthographier.

D’habitude, tu t’en cognes, tu laisses les gens se démerder. Mais là, l’heure est grave et tu as besoin de lui faire du charme. En étant… Ugh, aimable. Quelle horreur. Tu sais plus ou moins comment faire, mais l’envie te manque. Prend sur toi, sinon tu peux dire adieu à ton projet de vengeance. Tu sais que tu as besoin d’elle.

- Vous pensez que vous pourriez m’orienter vers des élèves sans rompre le secret médical ? Je vais demander un délais à mon professeur… J’espère qu’il acceptera de me le donner… Je comprends que vous soyez obligée de faire un rapport, j’espère juste que ça ne me mettra pas dans une situation trop problématique. Je n’ai pas vraiment besoin de ça en ce moment, pour être honnête. Bien sûr, je suis entièrement responsable de la situation… Mais c’est quand même très ennuyeux. J’essayais d’améliorer ma situation scolaire et je me retrouve comme un imbécile à l’empirer… c’est typiquement le genre de chose qui m’arrive habituellement.

Tu tires un peu sur ta natte, fuis toujours son regard et te concentres sur un point derrière sa tête. Tu as plus de facilité à mentir, et ta crédibilité est plus grande quand tu évites de regarder les gens dans les yeux—tu as l’air beaucoup trop impertinent quand tu les fixes, même quand tu ne le fais pas exprès, ça te vient de ton air mort à l’intérieur. En plus elle est gentille, on dirait une Infirmière Joëlle. Pas que ça te fasse ressentir une quelconque culpabilité à l’idée de lui mentir, mais tu n’as pas non plus envie de l’énerver pour rien. Les gens gentils qui s’énervent sont encore pires que les autres, parce qu’ils sont énervés d’être forcés de s’énerver. C’est un bordel. Biskit vient se frotter à ta jambe. Il ne sait pas lire, donc il n’est pas capable de trouver les bons dossiers pendant que tu distrais l’infirmière. Bravo. Tu devrais surement lui apprendre, un jour. Tu pourrais l’envoyer faire ce genre de missions. Tu aurais du lui demander de faire le guet. Tu aurais pu préparer ce plan tellement mieux, espèce d’imbécile. Tu soupires.

- J’ai peur de finir en classes d’aides si je n’ai pas une bonne note… Je ne connais personne là-bas… Je n’ai pas d’amis dans ma classe, mais je connais leurs prénoms et je les reconnais un peu. Là-bas, je serais perdu. Je n’aime pas beaucoup les changements d’environnements, je trouve ça trop angoissant.

Oui, tu parles comme une plante. Oui, tu en as conscience. Avec un peu de chance, ce n’est pas son cas. Et ce n’est pas parce qu’elle s’en rendra compte qu’elle ne te croira pas pour autant. Après tout, c’est la vérité. Tu détesterais devoir changer d’environnement aussi subitement. Et puis, ce n’est pas très rassurant de savoir que tu fais partie des cas désespérés. Tu ne fais pas partie des cas désespérés. Tu as un avenir brillant. Où ? c’est une très bonne question. Tu y répondras plus tard. L’avenir y répondra pour toi, même.

- Je ne suis pas un élève brillant… Je me suis dit que si je pouvais trouver un étudiant capable de créer des hallucinations et de les manipuler, j’aurais un bon sujet d’étude et qu’il pourrait m’aider à avoir une bonne note, et m’éviter de finir en classes d’aides. Et si je trouvais un bon élève parmi tous les dossiers, je pourrais peut-être même lui demander de me donner des cours particuliers, pour m’en sortir ! Cette école c’est un peu le seul endroit où on peut être en sécurité alors… j’avais peur d’être renvoyé et d’être obligé… de me débrouiller tout seul, dehors… vous comprenez ?

Tu portes une main à ta bouche, pour te mordiller une phalange de l’index. Tu pourrais te mordre les ongles pour le même effet, mais tu n’as pas trop envie de ruiner ton vernis. Tirage de cheveux, check. Mordillage de doigts, check. Regard fuyant, check. Tu pourrais essayer de te provoquer une crise de panique… Tu gardes ça en tête, en fonction de la manière dont les événements évolueront.

   

Oh non. Oh non, oh non, oh non. Tu es probablement tombé sur l’adulte le plus responsable de cette foutue académie. Le seul adulte responsable de cette académie, en y réfléchissant bien ; parce que sérieusement, autant le côté safe heaven est plutôt bien pensé, autant l’aspect « enfermer des gamins ensembles et prier pour qu’ils fassent pas tout sauter » et un peu plus précaire. La preuve ! tu es en mission de reconnaissance pour découvrir l’identité de l’abruti qui t’a joué un tour et tu as déjà prévu toute une séquence de vengeances plus ou moins grandioses. Et tu es en train de baratiner l’infirmière scolaire pour sauver ta peau parce que ladite mission de reconnaissante est très vite partie en vrille. Quasi immédiatement. Et ton meilleur et seul ami est un raton laveur. Est-ce qu’on peut faire plus chaotique comme environnement d’étude ? oui bon tu es pas vraiment là pour l’aspect scolaire, tes vieux t’ont envoyé ici pour pas que tu te fasses brûler vif ou autre activité déplaisante qui se passe dans les camps. Mais tu vas éviter de lui raconter tout ça, tu dois maintenir ton image d’élève perdu a l’envie de remonter la pente et de réussir ses études. Tu étudies quoi, déjà ?

Rentrer. Ça tu peux faire. Même si c’est très ennuyeux, puisque tu repartiras bredouille. Mais elle a l’air vraiment déterminée à t’aider alors… tu peux lui faire confiance pour te trouver les noms dont tu as besoin. Quitte à tous leur pourrir la vie si de nombreux étudiants ont ce pouvoir. Tu te passes une main dans les cheveux, débarrasse un bourgeon qui s’était glissé entre deux mèches et le glisse dans la poche de ta veste avec les autres. Tu notes dans un coin de ta tête : lui offrir un bouquet ou une plante quand cette affaire sera derrière vous pour la remercier de sa participation à ta vengeance. Même si tu lui diras que c’est en remerciement pour le soutien psychologique apporté ou une autre bêtise dans le genre. Tu hoches la tête et fait signe à Biskit de remonter sur son perchoir. Peut-être que le raton laveur achèvera de la convaincre, il est après tout terriblement mignon.

- D’accord… Merci beaucoup pour votre aide, c’est un véritable soulagement… Je suis désolé d’être entré par effraction, j’avais peur que vous me disiez que ce n’était pas votre problème mais maintenant je regrette de ne pas être venu vous voir directement, je me rend compte que vous avez vraiment l’air de vous soucier du bien être des élèves… je ne referai plus cette erreur.

Tu baisses la tête, l’air penaud pour donner plus de poids à tes excuses. Tu es surtout désolé de t’y être pris comme un pied et de t’être fait choper. Biskit baisse aussi la tête, l’air penaud. Thanks bud. Tu croises les doigts pour qu’elle change d’avis et ne décide pas de te signaler aux autorités compétentes, aka les autres adultes, ceux qui sont absolument pas fiables et entre les mains desquels tu ne placerais certainement pas ta sécurité si tu avais un autre choix.