Une suite de sept petits coups mélodieusement rythmés sur la porte nous interrompt William et moi dans notre atelier cuisine et signalant une présence. Probablement amicale pour se servir de la porte comme d’une percussion. Après avoir crié le classique « OUIII ? » à travers la maison en théorisant sur la présence de Oris ou Saoirse, je vais ouvrir, et me trouve surpris face à Affoue seule, le sourire toujours aux lèvres. C’est inattendu ! Oh non me dite pas que j’ai oublié un truc prévu avec les Carraigs ?
« Bonjour Affoue ! je ne m’attendais pas à te voir aujourd’hui ! On est en pleine cuisine, mais tu veux rentrer te poser un peu ?
— Arrête tout. Mets ça sur tes yeux. » Elle me tend le bandeau « Suis-moi. »S-salut à toi aussi, oui je vais bien et toi ? C’est gentil de demander, je suis vraiment touché par ta délicatesse pour ne pas me bousculer. C’est gentil de prendre le temps de t’arrêter et de ne pas effectuer l’équivalent d’un kidnapping positif et avec consentement. Et de pas rentrer dans le but de lancer William sur son mode clash, oui, vraiment, c’est gentil.
« JE TE LE VOLE WILLIAM ET SI T’ES PAS CONTENT, TOI, MOI, LA FERME A 18 h, OCTOGONE SANS RÈGLES.— Fonce il m’a foiré la ganache, j’aurais peut-être plus de chance sans lui. Ce qui y’a de sûr c’est qu’il ne m’aidera pas à devenir pâtissier, mais en le mettant en location je peux peut-être monter un commerce qui marche bien. Y’aura des clients en tout cas. » Mais. Mais William. Pourquoi tu me vends comme ça ? C’est pas de ma faute si le pot de sel et le pot de sucre ont la même tête, comme tu fais des réserves. Me mets pas en location, s’il te plaît, j’ai même fait la lessive.
« Et t’inquiètes, ne fait pas cette tête, je te garde du gâteau. Et quand tu veux pour l’octogone Affoue. »Je regarde successivement le bandeau, Affoue, William et bug. Trop d’info, qu’est-ce qu’il passe, j’étais juste en train de cuisiner tranquille moiii.
« Qu’est-ce que... quoi ? — Je suis la gardienne de ton secret Santa pour la personne qui te l’a offert. Mets ce bandeau sur les yeux. Suis-moi. »
Oh. C’est déjà un peu plus clair. Mais qui ça peut être ? Et qu’est-ce que ça peut être pour de telles dispositions ? Je suis curieux, mais haaaaaaaa !
« Rien que ça ? Très bien, très bien… Bon et bah zoupla boom, c’est parti, j’imagine. Est-ce que je dois avoir peur du fait que ce soit toi qui me fasses traverser la forêt les yeux bandés pour m’amener à une destination inconnue, alors que tu viens tout juste de proposer un octogone à William ? — MAIS NON ! aller. Zhou. Le bandeau. »
Je lâche un « D’accord », penaud et la laisse me guider à travers la forêt en priant pour qu’il ne s’agisse pas qu’une blagounette d’elle et Moira. On discute bien. Elle n’essaie de me faire aucune frayeur sur le trajet et me rattrape même les nombreuses fois ou je tente de rejoindre le tapis de feuille. Hmm ça ne ressemble pas à une blague de sa part, mais est-ce que ça pourrait en être une de la part d’un secret Santa qui a fait un peu de zèle sur l’humour ? Hmm. HMM.
Lorsqu’elle me signale qu’on est arrivé, elle me lâche et je reste immobile, raide pour éviter de cogner quoi que se soit. J’ai entendu des chevaux pas si loin que ça, j’aurais tendance à penser qu’on est près de la ferme, mais je suis tellement désorienté que je n’affirmerais rien du tout.
« Ok, ok, donc, c’est là ? On est où ? Il faut que je cherche quelque chose ?— Bouge pas. Ne boooouuuuuge pas. » J'acquiesce, et le silence prend la suite, entrecoupé de bruit de pas tranquille, et le mélange de hâte et de peur grandit de plus en plus en moi.
« Aie ! Mais vient espèce de patate ! Je vais t’avoir.... Ahahaha ! Je te tiens. Bryn ! Y’a un banc derrière toi. Assieds-toi. Tend les braaaaaas.... Not the face, not the... Pfoua, my noooose. »
Je recule en marche arrière et manque de me casser la gueule par manque d’équilibre avant de trouver le banc à tâtons et de finir de m’inquiéter. Qu’est-ce que c’est. Ça a l’air vivant non ? Oh mon dieu, mais si c’était une mauvaise blague et que c’était quelque chose qui faisait peur genre une petite bête magique effrayante ? HAAAAA. Je tends les bras, la tête de côté, craintif, mon imagination turbinant tout les pires scénarios possibles.
« Haaaaa, qu’est-ce que c’est, c’est gentil Affoue hein ? Dis-moi oui s’il te plaiiiiiit »Pas de réponse. Juste une boule de poils incroyablement douce qui atterrit entre mes mains et le bandeau qui vole.
« Il s’appelle Merlin. Joyeux Noël Bryn »
Une petite tête dorée encadrée de grandes oreilles tombantes, et un poil sombre marbré de safran. Un… Un chien ?
Mon regard se perd dans ses doux yeux d’ambre expressif surlignés de deux petites taches noires formant des sourcils amusant, tandis qu’il essaie de venir me renifler. Je ne réalise toujours pas, avant de me prendre un coup de langue par la figure.
J’ai un chien. J’ai. Un. Chien. Je sens les larmes me monter aux yeux et des sanglots de joie me prendre. La main sur la bouche à cause du choc, je toise Affoue d’un air penaud, mais tellement, tellement heureux.
« J’ai un chiiiiien ! »Je fais un bisou sur la tête de merlin et le pose sur mes jambes tandis qu’il roule pour jouer, et je le regarde, profondément attendris, le cœur complètement fondu. Je n’arrive pas à réaliser, non vraiment, ça ne veut pas rentrer dans ma tête.
« Tiens, sweety pony. »
J’attrape la carte que me tend Affoue et manque de la faire tomber tant mes mains tremblent.
« An-Andréatus ? »
Après avoir commencé par la fin, je redécortique le début avec l’identité de l’interlocuteur en tête. Il est si gentil. Et attentionné. Et… il faudra que je fasse quelque chose pour le remercier pour le plus beau cadeau du monde.
« Bien sûr que je vais garder ce petit ange. »
Je renifle à force de pleurer, et essuie mes larmes avec ma manche.
« T’es d’accord Merlin ? »
Je me penche le visage à hauteur du chien qui avance laborieusement dans ma direction avec ses déplacements patauds de chiot, comme si ses pattes étaient trop grosses pour lui.
« J’enverrais un mot au monsieur, et des gâteaux, et il pourra venir voir comment tu vas grandir et tout. T’es le plus beau, tu sais. Tu le sais ça que t’es le plus beau ? »
Je lui fais plein de papouilles, essayant de me remettre de mes émotions et de profiter de la présence de mon nouveau compagnon de vie, avant de bientôt le ramener chez moi.
Le ramener chez moi… OH. La réalité des choses m’attaque d’un coup, si bien que je ne remarque même pas que Merlin mordille ma main. Je m’étrangle un instant et me tourne vers Affoue.
« Et si William était pas d’accord ? Et-et j’ai pas de gamelle et de croquette, est-ce que je vais choisir les bonnes, et une niche, oh mon dieu il faut que je te trouve une niche et tout ce qu’il faut, et-et-et-et je veux son bonheur et bien faire, comment je vais faiiire.— Oh non, il nous fait une crise de éssiite aigüe. Caaalme, calme, on va pas te lâcher en pleine nature avec ton nouveau bébé t’inquiète pas on te donne ce qu’il faut.— D’accord, merci, pardon, fiouuu… »Ça va aller, ça va le faire, et ça va être bien. Je reste plus d’une petite heure à la ferme, à m’amuser et à découvrir mon nouveau camarade, pour faire connaissance, prendre le temps de réaliser avant de l’emmener. J'apprend que c'est un des petits de Avalon, que je n'avais pas vue depuis un moment cette petite puce. Merlin a des super parent et aura grandit dans une super famille, j'espère que j'arriverais à lui offrir d'aussi belle condition de vie !
Je fait signe à Affoue que je me sens prêt et on charge la remorque du quad ensemble, mon bébé d’amour dans une caisse avec un drap dessus pour être moins stressé par le trajet. Je comprends les jeunes parents qui sont super angoissés et qui ont envie de sécuriser chaque coin de leur maison. Parce que ; pareil. On laisse le tout charger, mais il s’agit pour l’instant de prévenir William.
J’entre l’air un peu penaud en rasant les murs jusqu’à la cuisine, et il sait déjà ce que ça veut dire vue sa tête dubitative.
« William, on, heu, je peux te parler une minute ?— Qu’est-ce que tu as encore était m’inventer comme merveille…— T’aimes bien les animaux ?— Oh non, Brynjolf me dit pas que…— Mais c’est mon secret Santa qui me l’a offert, et il s’appelle Merlin, il est très chou, et on a beaucoup de terrain, et, et, et… »Il soupire profondément, mais je ne le remarque même pas.
« Te fatigue pas je suis pas particulièrement contre tant que tu gères, mais prévenez quand vous faites ce genre de connerie les jeunes, ou je mets aussi le chien en location.— Et en plus c’est un chien rêve, et j’ai tout ce qu’il faut pour m’en occuper, je suis sur qu’il pourrait être heureux et-— Oh non il est encore bloqué. Bon tu me le présentes au lieu de me faire un exposé ? »Je cligne des yeux, sonné. Il a dit oui ? IL A DIT OUIIII. Je m’étais préparé au pire et- Waaah… Quel soulagement ! Affoue regarde la scène en souriant, et on part tous décharger la voiture histoire de mettre en place son petit coin de paradis pour qu’il débarque dans de bonnes conditions. La niche, ses gamelles, ses jouets, tout, avant d’apporter la caisse et de le laisser explorer le salon. Je l’aime déjà beaucoup trop, et rien que de l’observer visiter avec son air curieux me remplit de joie. Je m’assieds en tailleur au milieu de la pièce pour qu’il vienne me voir si l’en a envie, et souris béatement. Il faudra que je remercie Philophae. Affoue, William, et tout le monde pour avoir la chance d’élever ce petit chou. Et ça va être bien. Ça va être super même. Hein, Merlin que ça va être super ?