UNDERESTIMATE ME, THAT'LL BE FUN - SUITE [ft Jo]
Elarielle était prête à en découdre, elle n'attendait qu'une chose c'était qu'il craque. Mais un inconnu, encore un débarqua pour le faire s'éloigner. Elle jura intérieurement. Fait chier. Elle n’avait d’autre choix que de lever les yeux vers la femme qui la retenait, lui prêtant enfin attention. Son ton était un peu sec mais surtout très fatigué. Le tir à l’arc suivit de l’utilisation de son pouvoir avaient puisé dans ses réserves.
"Je ne sais pas si j'ai envie de rendre des comptes. Vous avez très bien compris que j'avais encore utilisé mon pouvoir de toute façon je ne suis plus a ça près maintenant."
L’inconnue lui fit un signe de la main pour qu'elles parlent en marchant. Elarielle ne résista pas et lui emboîta le pas, déjà parce qu’à part son épaule douloureuse rien en l’empêchait de bouger, elle ne supportait pas d’être assise, et de toute façon elle n’avait pas l’air d’avoir le choix.
"Ouais mais ça je m'en carre pour l'instant. J't'ai demandé les faits que j'connais pas, pas ce que j'ai vu. Tu préfères te poser ou on continue de marcher ? J'me dis qu'il faut aérer vos neurones grillés un peu.
- On était en train de se battre pour une cible. Il a amplifié ma douleur à l'épaule je me suis vengée, c'est aussi simple que ça."
Aussi simple. Évidemment que non ça ne l'était pas, ce connard avait fait remonter des souvenirs qu'elle connaissait mais mis sous son nez comme ça ça ne fait jamais plaisir, surtout si c’étaient des souvenirs assez désagréables. Jo hocha la tête. Elle n’avait absolument pas l’air convaincue par son explication.
"Ah ouais, t'es sûre que c'est simple ? T'as quelle part de responsabilité dans tout ça, et lui ? On va faire un tour à l'infirmerie, histoire de checker ton épaule."
Le visage d'Elarielle se ferme. Elle réfléchit un peu avant de répondre. "Est-ce que ça avait l'air d'être simple ? Ça ne l'est jamais quand les deux parties commencent à aller fouiller dans l'esprit de l'autre. Et on a pas des pouvoirs qui sont faits pour faire remonter des choses heureuses."
Elle hésite un peu. Elle pourrait remettre toute la faute sur Mordred mais elle est épuisée d'avoir l'impression de se battre en permanence contre ses démons. Il les luit avait fait ressortir avec violence et ça lui avait fait bien plus de mal que ce qu'elle aurait pensé.
"On est autant responsable l'un que l'autre. Chacun voulait se défendre.
- Bah raconte pas des cracks si c'était pas simple. Vous êtes tous les deux bien amoché.es, j'vais pas insister pour aujourd'hui mais j'doute que ça en reste là." Elle lui ouvre la porte de l'infirmerie. "J'appelle un psy ? J'suis pas formée pour gérer vos merdes émotionnelles, donc j'peux t'écouter comme tu veux j'suis pas sûre que ça t'aide."
- Je sais bien que ça n'en restera pas là." A vrai dire ça ne la tracassait pas vraiment, elle connaissait les conséquences de ses actes. Elle sourit de manière ironique. "Un psy bah bien sûr j'ai une tête à vouloir parler ? Donnez-moi un truc sur lequel je peux me défouler ça ira bien plus vite."
Jo lui jeta un coussin à la figure avec une grimace
"Y'a qu'ça pour l'instant. T'as vu l'équipement sportif de l'académie ou pas ?"
Elarielle regarda le coussin. L'idée de le lui renvoyer lui passa furtivement par la tête. Voir jusqu’au elle pouvait pousser sa « sauveteuse ». Mais cela risquait encore d’empirer son cas. A la place elle se contenta d'y enfoncer ses ongles, ça sera toujours mieux que dans la paume de ses mains.
"Oui j'y vais souvent. Vous m'avez même pas dit qui vous étiez.
- Ah ouais bordel. J'suis prof et patrouilleuse. Joséphine Chovet. Sur le coup c'est pas ce qui comptait, vous étiez tous les deux dans une situation trop craignos pour que vous en ayez quelque chose à carrer de mon nom. ça veut dire qu't'es calmée ?"
- Prof de ? " Elle l'avait jamais vu. Ce qui n'était pas très étonnant mais mieux elle en savait mieux c'était. Lui parler d'autres trucs permettait d'éloigner son esprit de ce qui l'a tracassait. Elle écarta la bras avec un soupir puis dit d’une vois remplie d’ironie. "Je sais pas Madame Chovet ai-je l'air calmé ?
- Survie." Elle l'observe. "Assez pour faire la mariolle ?"
Elarielle haussa un sourcil à la mention de la matière. Des cour de survie, franchement, qu’est-ce que cette école était allée inventer ? Ils avaient une prof en trop et ils ont du trouver une matière à la va-vite ? La jeune femme ne voyait pas l’intérêt de ce genre de cours, tout mage devrait avoir appris à se défendre et à survivre.
"Parce qu'il y a besoin de cours pour ce genre de choses ?"
Joséphine s'appuya contre le mur. "Tu arriverais à te démerder seule en pleine nature du jour au lendemain, avec la menace de te faire choper par ces couillons d'anti-mages ? C'est pas donné à tout le monde.
- Ces couillons d'anti-mages si je retombe dessus je leur laisserais moins de chances de s'en sortir que la première fois. Et deuxième question : pourquoi aller en pleine nature ?"
- Elle sourit, amusée. "Ouais, on le souhaite tous. J'te parlais pas de la vraie nature, même si c'est compris dedans. T'as jamais entendu parler de la jungle urbaine ?"
Elarielle plissa les yeux, étonné qu'elle soit amusée et pas énervée. Elle était pourtant assez insolente pour la pousser dans ses retranchements, mais non, elle ne semblait même pas y faire attention.
"Oh si j'ai géré des gars qui venaient de là-bas avant. Mais c'est pareil je veux dire en quoi c'est difficile de survivre la bas ?
- Comment tu les as géré ? C'est facile pour qui sait y faire, mais pas pour les autres. T'en as combien qui crève bêtement parce qu'on leur a jamais appris à se défendre et à se débrouiller ? Tout le monde part pas avec les mêmes compétences dans la vie.
- J'étais gardienne de prison. Et je sais que tout le monde n'a pas la chance d'être bon là-dedans mais quand on est mage c'est la première chose à apprendre à mon sens. Se défendre."
- Elle hoche la tête. "On va finir par tourner en rond si t'accepte pas que tout le monde est pas toi. T'as parlé aux autres étudiants depuis qu't'es là ?"
Elle soupira. Les gens y gagneraient peut-être à être elle, ou peut-être pas. Ça serait quand-même drôle d'essayer. Mais la vérité c’est qu’elle avait effectivement échangé avec d’autres élèves mais pas vraiment parlé, juste demandé des choses par intérêt, ou ordonné des choses. La seule chose qu’elle savait d’eux c’est ce qui était utile pour elle et leur nom. Et encore.
"J'ai... parlé est un grand mot. Un peu. Pas beaucoup.
- J'te juge pas, c'est pas simple. Surtout avec les hommes, plus cons tu meurs. Mais tu sais, la survie c'est aussi savoir parler aux autres."
- Elarielle esquissa un sourire. "Je connais quelqu'un qui serait tout à fait d'accord avec vous. A quoi me serviraient les autres ?" Il y a du dépit dans la dernière phrase, elle n'y croyait pas du tout.
- Oulah. T'es sûre de vouloir la liste ? Et c'est qui cette personne ?"
Elarielle la regarda. Elle ne se l'avouait pas mais elle aimait bien cette discussion. Après la dispute avec Mordred les échanges étaient bien plus doux, mais pas moins intéressants. En fait, elle avait l’impression d’avoir quelqu’un à sa hauteur dans sa réflexion, et elle aimait beaucoup ça.
"On a du temps non ? T'as peur que je sois choquée ou elle est trop longue ? Une nana de mon âge avec qui on a parlé... des avantages et inconvénients d'avoir un gars sous le coude dans son entourage. Bref"
Elle ne donnera pas le nom de Muse histoire de ne pas lui faire dire des choses sans qu'elle ne le sache. Jo rit.
"Hey, c'est la bonne philosophie ça. Les mecs c'est bien que sous le coude. Ou sous un bus. Ça se discute mais t'as pigé." Elle réfléchit. "Nan, tu vas pas être choquée pour si peu. On va commencer par les trucs nian nian, genre se sentir compris et apprécié. Ça met de bonne humeur, ça fait parler, rire, cte genre de connerie. Les autres servent à avoir des informations sur le monde, comment se font les choses à tel ou tel endroit. Ils servent à voir plus grand, ouvrir les yeux. Puis ils servent à se faire du bien. Perso j'prefere les meufs donc voilà, mais jamais j'abandonne cette façon de me "servir" des autres hein. Puis sinon ça aide à se trouver. A toi, tu penses que les autres peuvent servir à quoi ?"
- Elarielle esquissa un nouveau sourire. "J'ai pigé oui et j'avoue être à moitié d'accord. Y'a des exceptions." Elle grimaça. Se sentir compris et apprécié. Se trouver. Que des conneries. "Sincèrement ? Je suis d'accord avec se faire du bien. Je suis aussi d'accord pour les infos. Pour le reste jmen tape je vois pas l'intérêt. Pour moi ils sont utiles..." Si on doit se planquer et avoir un appât, a en faire des serviteurs, à être admiré. Mais pas sûr que ça soient des bonnes réponses. "A pouvoir développer ses compétences. Et à sortir s'amuser. Et a comploter aussi.
- Le fameux Not all men? Tu vois t'as des idées et elles sont bien. Peut être que tu les pensais pas mais je prends. Tu veux comploter pour quoi ? Fais gaffe, j'accepte que les idées anti gouvernementales."
Elarielle ouvrit de grands yeux, surprise. C'est la première fois qu'un prof ne l'envoyait pas bouler alors qu'elle la cherchait assez clairement. "Je...heu... A propos d'un mec qui s'est foutu de moi on voulait... Non oubliez ce que je viens de vous dire."
Elle éclata de rire. Elarielle ne savait pas si elle était en train de se moquer d’elle ou non. "Bah quoi, c'est quoi cette tête ? Finis ton histoire, jsuis curieuse maintenant."
Un élan d'honnêteté survint elle ne sait comment. Elle avait l’impression qu’elle pouvait tout lui dire. C’était à la fois fascinant et vraiment inquiétant. "Il m'a chauffé et s'est barré sans rien faire. On voulait le rendre jaloux. C'était mieux que de mettre du piment tous les jours dans ses plats." Elle la fixa puis inspira. "Pourquoi t'es encore là et que tu m'as pas encore envoyé chié ?
- Aaah, rien de mieux que d'être bercée au doux son d'un homme souffrant... Pourquoi j't'enverrai chier ? Notre conversation est pas ennuyante. OK t'as merdé avec l'autre élève mais c'est pas une raison pour pas profiter d'une bonne discussion, tu trouves pas ?"
Elarielle se retint de rire. Ça faisait très longtemps qu'elle n'avait pas ri maintenant qu'elle y pensait. Sans s'en rendre compte Jo était en train de passer tranquillement ses défenses une a une.
"Je suis étrangement d'accord. Mais en général je suis assez imbuvable pour que les gens se lassent vite."
Elle lui sourit en la voyant se retenir de rire puis elle ricane. "Ouais alors, j'ai descendu assez de cocktails dégueulasses pour te dire que t'es pas si pire. T'es loin d'être imbuvable, de ce que je vois maintenant."
Elarielle leva les yeux au ciel. "Oui oui c'est ce que tu te dis maintenant mais heureusement que t'as pas à me voir tous les jours tu changerais vite d'avis.
- Mouais. Alors. Y'a déjà une grosse remarque au marqueur rouge sur ton dossier et t'as encore merdé. Le personnel de l'école devait déjà être vigilant, j'vais devoir signaler qu'on doit renforcer ça. Pas ouf hein, mais bon"
- Elarielle soupira. "Elle dit quoi la remarque ? Par curiosité. Et ça veut dire quoi renforcer ça ?
- Attention, élève caractérielle avec une bonne repartie. Nan, en vrai, c'est pas à moi de te le dire. Renforcer la vigilance. Si j'étais pas intervenue, j'sais pas ce qu'il resterait de vous deux. T'es pas sortie entière de ta dernière dispute hein.
- Pourquoi c'est pas à toi ? C'est à qui ?" Elle fit une grimace. "Il en serait pas resté grand-chose. Et non, des deux d'ailleurs.
- Les gens qui sont responsables de toi, j'en sais rien ?" Jo pencha la tête. "Ah ouais ? T'as perdu quoi aujourd'hui si c'est pas indiscret ?"
- Elle la regarda avec incompréhension. "J'ai personne. A moins que cette personne ne se soit pas encore manifesté mais a priori bon. Personne." Elle se referma un peu, sachant très bien ce qu’elle perdait à chaque fois qu’elle avait ce genre de conflits. "Encore une partie de mon esprit. C'est pas grave je finirais vieille folle."
- Elle haussa les épaules. "Fais pas ta dramaqueen va, t'es pas toute seule. Ça se passe bien là entre nous. Pour ton esprit c'est plus embêtant... Y'a des techniques à prendre, ou des outils pour mieux vivre avec les contrecoups psy mais ça demande de l'aide et du temps."
Elle eut envie de lui répondre que c'était bien la seule personne avec qui ça se passait bien tout de suite. Avec n’importe qui d’autre la discussion tournait très vite dans des choses plus virulentes, ou alors il n’y avait pas de discussion tout simplement. Surtout sur ce sujet.
"Ouai. De l'aide ? Je sais pas. Du temps j'en ai de l'aide je sais pas si j'en veux."
- Elle sourit. "Eh, tu sais quoi ? Si t'as le temps ça veut dire que t'as aussi le temps de vouloir de l'aide au bout d'un moment. C'est comme la survie, ça vient pas naturellement à tout le monde et parfois faut un déclic."
- Ouai je suis pas vraiment convaincue mais bon. Jte laisse le bénéfice du doute."
Elle eut envie de rajouter que de toute façon personne ne supporterait de l'aider. Certains avaient essayé et s'étaient royalement ratés. Mais elle ne voulait pas donner l’impression de se plaindre d’une quelconque manière, elle ne le ferait donc pas.
"Tu verras avec le temps" Elle rit. "Cette phrase de vieux, bordel. La méga lose de s'improviser vieille daronne."
- Elarielle la regarda avec un air malicieux. "Ah mais parce que t'es pas vieille ?"
- Elle souffle, amusée. "Je suis dans mon âge d'or tu veux dire.
- Ouiiii oui bien sûr exactement ce que j'étais en train de dire." Son ton était teinté d’une très forte ironie. "Dis comme t'as lu mon dossier jme demandais... Tout est marqué dessus ?
- Je peux pas partager ce genre d'info. Ça t'inquiète?
- Non j'aime juste savoir qui est en possession de quelles informations à propos de moi. Surtout celles qui sont un peu plus délicates.
- Du genre ?
- Du genre l'utilisation que je faisais de mes pouvoirs avant.
- Ah. Écoute, l'école accepte beaucoup de gens de tout horizon. Toutes les infos sont bonnes à prendre mais ça empêche pas de pouvoir se refaire ici.
- Donc elles y sont."
Elle fit un sourire presque triste. Elle avait tout de même eu une once d’espoir que toutes les informations à son sujet n’étaient pas parvenues jusqu’ici, surtout celle sur son utilisation de pouvoir. Qu’ils sachent qu’elle était gardienne n’est pas dérangeant, mais tout le reste… Ce n’était pas pareil. Et surtout si Joséphine savait, elle ne devait pas être la seule à être au courant de ce qui se trouve dans son dossier.
"Se refaire. J'ai un peu foiré ducoup ?
- Disons que ton départ est pas réussi, mais ça t'empêche pas d'évoluer à ton rythme. L'école est patiente. La preuve, t'es encore là."
Elle se demandait bien ce qu'elle foutait encore là d'ailleurs. A parler. A se livrer. Putain elle avait réussi à la faire parler. Il fallait qu’elle arrête là ou ça risquait d’aller encore plus loin. Et elle n’en avait aucune envie.
"Bon. On a fini ?
- Ouais. A la prochaine gamine !"
Elle aura juste un vague signe de tête de la part d'Elarielle lorsqu’elle sortit de l’infirmerie.
Mer 30 Aoû - 15:12