Cette journée s’annonçait radieuse. Le soleil dehors en tout cas l'annonçait, et le sourire que Lisianthus affichait depuis le matin aussi.
Les gamins étaient pour une fois pas trop insupportable et ne courraient pas de partout dans les couloirs. Il y en avait même une qui lui avait dit bonjour en étant vraiment avenante ! Incroyable.

Bon, il faut avouer qu’avoir une surveillante qui parle à un fantôme que personne d’autre qu’elle ne voit c’était probablement pas la chose qui vous mettait le plus en confiance. Mais peu lui importait. Lisianthus lui était d’une grande aide dans son travail, remarquant des détails qui lui échappait bien souvent. Il était ses yeux invisibles et imperceptible, à part par Mikia qui voyait les morts et servait souvent d'alarme pour tous les autres. Elle n’aimait pas Mikia. Lisianthus par contre appréciait le gosse, comme il était un des seuls auxquels il pouvait parler. Fair enough, dirait-on.

Bref ! Passons. Tout cela pour dire que la journée était belle et le hall accueillant. Elle s’apprêtait à le traverser quand Lisianthus lui tapota l’épaule.

-Quelqu’un vient dans ta direction.

Elle redressa la tête et aperçut une jeune femme extrêmement colorée et souriante qui, effectivement, semblait sur le point de l'interpeller.

-Bonjour, enchantée, je suis Balzamina Dulac ! Vous savez peut-être, la nouvelle infirmière ! Je viens d’arrivé et heuu, je m’attendais pas à voir un endroit aussi grand. Enfin je ne trouve pas le chemin de l’infirmerie, peut être que vous pouvez m’indiquer ?  Ou vous savez si quelqu’un devait me faire visiter ? Mais excusé moi je ne vous est pas laissé vous présenter.

Whaou, que d’énergie ! Son sourire était aussi extrêmement contagieux. C’est donc avec un air incroyablement afable et enthousiaste que Paulia lui répondit.

-Bonjour Balzamina, je suis Paulia Caldas. Je suis surveillante ici, et non je ne savais pas que vous arriviez aujourd’hui ! Ne vous inquiétez pas, l’école est un vrai dédale, tout le monde est perdu au début. A l’infirmerie il doit sans doute y avoir des plans. Vous avez une heure de rendez vous spécifique ? Si vous voulez je viens de finir mon dernier tours, je suis plus “de service”, et si vous avez du temps je peux vous montrer les lieux.

-Elle a l’air chouette, indiqua Lisianthus à sa camarade. En tout cas, bienveillante. Pour une fois que quelqu’un du médical a pas l’air complètement frappé dans cette école… Je pourrais presque ne pas avoir peur d’elle même avec une seringue à la main.

La jeune femme se retint de lever les yeux au ciel. Il n’avait pas a avoir peur de quoi que ce soit, il n’avait pas de corps. Mais il était vrai que tous ses rendez vous chez le médecin était très très compliqué, particulièrement si des seringues étaient impliquées. Tous lui rappelaient l’usine, mais la nouvelle venue était suffisamment lumineuse pour ne pas ramener immédiatement d’odieux et sombres souvenirs.

La jeune femme reprit d'un air enjoué.

-Je commence dans 15 minutes, donc j'accepte volontiers votre proposition ! Enfin maintenant qu'on est collègue on pourrait se dire "tu" ? On pourrais passer en premier à l'infirmerie ? Je ne suis pas sur de pouvoir aller beaucoup plus loin sans rien casser


Hein ? Comment ça sans rien casser ? Ah. Les affaires qui échappent à l'infirmière répondirent assez vite à sa question. En même temps, chargée comme elle était, c'était normal qu'elle galère. Lisianthus rit gentiment et Paulia lui lança un regard désapprobateur.

-Oh, ça va ! J'ai le droit de me moquer gentiment, moi je peux plus rien porter, les mortels me doivent bien ça ! D'ailleurs, elle aussi elle rigole.

Balzamina venait effectivement de rire avant d'indiquer le départ et de demander à Paulia depuis combien de temps elle était à Leoska. Paulia lui indiqua donc la direction de la main, se mettant en marche. Puis, constatant qu'elle était vraiment trop chargée pour pouvoir se déplacer aisément, elle lui prit une de ses valises.

-Laisse moi t’aider, ça sera plus simple pour toi. Du coup, pas de soucis, tutoyons nous ! Et si tu commence dans 15 minutes, il vaut peut être mieux qu'on se retrouve plus tard, après ton service pour le tours de l'école. Ça va nous prendre bien plus de 15 minutes, c'est vraiment grand comme endroit. Quand a depuis quand je suis ici, ça fait... Je sais plus exactement, entre 3 et 5 ans. J'ai une très mauvaise notion du temps. A gauche.

Elle allia le mouvement à la parole, bifurquant dans un couloir s'enfonçant dans les entrailles du bâtiments, vers les dispensaires médicaux.

-Et oui, on va même très sérieusement être collègues. Je bosse avec la prévention addiction. Mais l'équipe médicale te feras sans doute un topo !

-Vouais, d'ailleurs il parait que y'a un élève qui deale. J'ai entendu des gens en parler, va peut être falloir s'y intéresser pour régler le problème.

Paulia fit signe à Lisianthus qu'elle avait entendu et prit en compte sa remarque. Le trio continua sa route quelques mètre encore puis Paulia s'arrêta et pointa une porte sur la gauche.

-Bienvenue chez toi ! Je te laisse gérer. Tu finis à quelle heure, que je vienne te chercher.

Vu l'horaire donné par l'infirmière ils avaient du temps devant eux, soit le temps d'un BAIN !

Paulia adorait les bains. C'était sans doute une des plus chouettes choses au monde après faire la cuisine et manger. Aussi, elle marchait d'un pas très enthousiaste jusqu'à son appartement et, une fois rentrée, mis de la musique. Tout en dansant, elle se roula de quoi fumer dans la baignoire et alla la remplir d'eau chaude, s'organisant de quoi avoir un moment tranquille.

Tout en se plongeant dans l'eau chaude, elle devisait avec Lisiantus.

-On commence par quoi ce soir ? Les bâtiments principaux ?

-Bah, oui ! On va être déjà dedans. Tu veux lui faire visiter les parcs de nuit ?

-Mouais, c'est vrai que c'est le meilleurs moyen de se faire une cheville. Après, elle infirmière donc en soit si on se fait mal on a la solution !

-Non, mais même au delà de ça. Un bâtiment ça s'éclaire mais les extérieurs à la lampe de poche, chuis moyen sur.

Paulia prit le temps de réfléchir puis acquiesca. Au moins aurait-elle vu les principales constructions.

-Paulia, faut que tu sorte, tu vas être en retard.

Elle regarda l'heure avant de lâcher un "oh merde" et de se ruer hors de l'eau. Attrapant sa serviette, elle se roula dedans, se séchant à la va vite. Puis elle sauta dans un pantalon en tweed, attrapant une chemise bordeaux au passage. Mettant son haut en même temps que ses chaussures, elle se démena et fut dehors, propre, habillée, sa porte fermée moins de 10 minutes après.

S'élançant dans les couloirs avec Lisiantus à son côté, elle courait en esquivant ceux qu'elle croisait d'un petit bond sur le côté. Arrivée devant le dispensaire, elle rentra et demanda Balzamina. On lui indiqua un bureau et elle toqua avant de passer la tête dans l'ouverture.

-Ah salut ! Je viens juste de finir ! Tu as passer une bonne journée ?
J'ai besoin d'un peu de calme dans si tu es d'accord on fait le tour avant de discuter de nos futur collaboration !

Paulia entra dans le bureau, regardant autours d'elle. L'ambiance était bien plus chaleureuse qu'avec le prédécesseur de sa nouvelle collègue ! C'était vraiment chouette.

-Oui, j'ai eu le temps de prendre un bain. J'étais au anges. Tu vas vouloir passer à ton appart pour poser tes affaires ? J'ai un peut réfléchit et je pense qu'on va aller voir les bâtiments et que les extérieurs attendront. Le soir c'est pas l'idéal pour voir ce qu'il se passe dans les parcs et autres... Disons que la luminosité n'est pas optimale. Tiens, je te prends un sac !

Elle allia le geste a la parole avant de sortir du bureau et de demander à l'infirmière la direction à prendre.

Balzamina accepta avec enthousiasme sa proposition et il fut donc décidé de passer par chez elle. Avant de partir, Paulia récupéra une carte sur une des tables de l'accueil de l’infirmerie puis elle laissa Balzamina refermer la porte.

-Pour aller à l’aile est, là où sont nos résidences, il est effectivement plus simple de passer par le hall. Tiens, j’ai prit cette carte ! Du coup, nous on est là, dit-elle en pointant du doigt leur positions, et l’aile est est là. On va donc aller au hall par ce chemin là, mais on peut aussi aller jusqu’à l’aile est par là, sans redescendre dans le hall. Mais bon, t’es pas obligé de tout retenir, ne t’inquiète pas ! Ca viendra au fur et à mesure.

Paulia se mit en route, Lisianthus flottant à côté d’elle, sur le dos. Il sifflotait un air dansant tout en agitant la tête.

-L’école est vraiment grande. Comme elle est en grande partie autosuffisante, il y a un grand nombres d’infrastructures ! Les bâtiments de cours sont séparés des dortoirs. Les résidences du personnel sont à part et sauf dérogation spéciales elle ne sont pas accessibles aux élèves. Ah, et on est pas censées avoir accès aux résidences des élèves. Je dis censées parce que en tant qu’infirmière toi tu as le droit tout le temps et moi, dans le cadre de la prévention, je peux y avoir accès. Mais sinon, les accès y sont limités. Comme endroits sympa y’a la cafétéria. Ils servent des repas et des collations régulièrement. C’est simple mais on y mange bien. Ah et je ne sais pas si t’es au courant, mais niveau hygiène, heu… Féminine, Leoska fournit le matériel. Que du lavable sauf besoins particuliers !

Le hall passé, elle se retrouvèrent de nouveau dans des couloirs un peu similaire mais du côté des résidences du personnel.

-C’est lequel d’appart, ta maison ?

Premier étage, au fond, à gauche. Parfait ! Elle s’y rendit et Balzamina ouvrit la porte et la laissa passer, lui indiquant le sofa après s’être excusée pour le bazar. Paulia lui assura que tout allait bien tandis que Lisianthus flottait jusqu’au siège et commençait à analyser son environnement.

-Plutôt sympa comme appartement.

La pionne s’assit confortablement sur le sofa. Elle ne s’était jamais sentie gênée en arrivant chez quelqu’un qu’elle ne connaissait pas et agissait souvent comme si toutes les maisons où elle se rendaient étaient les siennes. Parfois cela dérangeait mais elle s’en moquait assez : elle accueillait tout le monde chez elle avec la même hospitalité, elle pouvait donc se le permettre. Balzamina revint et lui tendit un verre d’eau qu’elle prit.

-Je n'ai rien d'autre à te proposer pour le moment, je suis arrivée avant hier.

-Ne t’inquiète pas, c’est parfait.

Elle lui sourit, buvant son verre d’eau en souriant. Derrière elle, le fantôme flottait d’un air satisfait tandis que l’infirmière était repartie vaquer à ses occupations de préparation. Lorsqu’elle réapparu, elle avait son sac à main et avait l’air ultra enthousiaste.

-On commence par où alors !?

Excellente question. L’école regorgeait d’endroit magnifique mais appréciable de jour. Avec la nuit tombante, les lieux allaient tous perdre de leur superbe.  

-Hum....

-Y’a toujours les bâtiments de cours, mais c’est pas vraiment passionnant.

Elle hocha la tête, réfléchissant aussi de son côté sans regarder le fantôme pour autant. Elle avait accès à beaucoup d’endroit grâce à son statut de surveillante, y compris après leur fermeture. Cependant, l’intérêt de ces bâtiments à la nuit tombée était somme toute moindre si ce n’est inexistant, à part pour les trois ados en manque d’adrénalines qui allaient y fumer. Quant aux jardin c’était bête d’y aller à la lampe torche...

-Vu l'heure, pas les extérieurs... La batiments de cours peut être ?

-Oh ! Je sais : les serres.

Lisianthus tu es un génie, pensa-t-elle. Bien sur, les serres ! Elles pouvaient être éclairées et, en plus, certaines espèces nocturnes de plantes magiques donnait un effet magnifique aux plantations.

-Ou on peut aller voir les serres, elles sont très impressionnantes.

-Je te fais confiance ! Les bâtiments de cours m'ont été expliqués aujourd'hui et me seront sûrement répété, les serres ça me semble super !

Paulia souri à Balzamina, la devançant pour sortir.

-Et bien parfait ! Les serres se sera donc !

Elle s’appuya sur le mur en attendant que l’infirmière ferme sa porte puis pointa une direction dans le couloir et se mit en route tout en se remettant à parler. Avoir un bon premier contact lui semblait important et ça passait par les mondanités, et elle se débrouillait très bien en mondanité.

-Mais du coup ! Tu es là depuis avant hier c'est ça ? Tu faisais quoi avant ?

Derrière elle, Lisianthus s’était d’abord figé et avait flotté aussi vite que possible pour se mettre devant elle, lui prenant les épaules.

-Nope, nope, nope. Je t’arrête là direct, c’est une très mauvaise idée. Si elle parle d’elle va falloir qu’on parle de nous et autant avec les autres on peut mentir, avec les élèves on peut ne rien dire mais elle, elle a accès à ton dossier ! Ca ne peut que mal finir, part pas dans cette direction.

Paulia le regarda un instant dans les yeux, lui faisant discrètement signe de se taire. La peur du corps médical restait malgré tout, mais c’était une collègue ! Elle avait accès à son dossier et alors ? Qu’allait-elle en faire à part rien ? Si elle posait des questions, elle lui dirait simplement qu’elle n’avait pas envie d’en parler et la question serait aussitôt réglée. De toute façon, c’était une mage pas une humaine, donc bon.

- Je viens de finir mes études d'infirmière, c'est mon premier poste. Et aussi la première fois que je vie avec des mages autres que mes parents. J'ai étudier en Auvergne dans une école plus classique mais je voulais pouvoir arrêter de caché mes pouvoirs.

Paulia s’arrêta et regarda Balzamina avec un air de surprise, se faisant violence pour avoir simplement l’air surprise et non terrifiée ni perdue. Elle avait vécu parmi eux ? Étudié parmi eux sans jamais éveiller le moindre soupçon ? Comment ?

-Wha.

-Tu as vécu... Parmi eux ? Tu ne t'es pas trop senti en danger ?

Lisianthus flottait autours de la soignante, l’observant sous toutes les coutures avec un regard fasciné tandis que la brésilienne tentait de l’ignorer tant bien que mal.

-Soit elle est extrêmement puissante, soit extrêmement discrète, soit extrêmement bien assimilée.

Dans l’attitude du fantôme transparaissait l’envie d’en savoir plus. Il avait besoins d’être fixé, absolument.

-Pas du tout, mes parents se sont rencontrés à Leoska mais voulais vivre "comme tout le monde" et aussi et surtout laisser le choix à leur potentiel progéniture. Enfin c'est ce qu'ils me disent. Et bon on à la chance d'avoir des pouvoirs facilement dissimulable. Ils sont médecins aussi, donc quand j'ai découvert mes pouvoirs l'academie nationale à cru que j'avais des problèmes de santé et ont à jamais eu de soupçon sur nous. Je sais que c'est une chance surtout que Leoska n'est jamais loin de chez nous au cas où.

Paulia sourit, réfrénant son appréhension.

-Ah. Je vois.

-Je comprend que leurs choix peut être étrange à comprendre. Je t'avoue que même moi je ne suis pas sûre de le comprendre ni qu'ils m'ont donner de vraies explications.

Le mort posa la main sur l’épaule de sa partenaire pour attirer son attention.

-Je veux lui parler.

Paulia claqua discrètement la langue pour signifier son désaccord mais le blondin n’en démordait pas.

-Bref on peut repasser aux sujets plus simples, c'est la serre qu'on aperçoit derrière ?

-Elle fait partie des assimilats, ceux qui ont réussi l’objectif de l’école. Je veux comprendre comment, je veux lui parler. Je veux savoir qui sont ses parents, si je les ai connus, si ce sont des camarades ou des gens se laissant simplement porter.

Elle ignora complètement Lisianthus, souriant à Balzamina. Elle allait pouvoir échapper à cette discussion malaisante avec son camarade et l’idée en elle même était réjouissante. Son aînée pointait effectivement les serres de cours. Immenses construction en verre, harmonieuse et aérienne, elle abritait un grand nombre de plantes différentes utiles à l’apprentissage des élèves. Depuis l’intérieur fusait une douce lumière, mélange d’origine artificielle et bioluminescente. La porte d’entrée était composée d’immense vitraux représentant les quatres magies et leurs porteurs, donnait à l’ensemble une aura presque religieuse.

-Oui, c'est la serre pour les cours. Elle est belle hein ? C'est par là qu'on entre.

-Paulia, s’il te plait.

Lisianthus avait vraiment l’air blessé par son refus mais elle l’ignora complètement et commença à marcher vers la porte, assez déterminée. La fantôme alla flotter à côté de Balzamina, faisant les yeux doux à Paulia.

-Je peux rien faire sans toi. Paulia ! S’il te plait, je veux comprendre.

La mage blanche s’était arrêtée, en pleine réflexion. Elle grommela, se retournant pour fixer Lisianthus qui la regardait avec des yeux de chats.

-Bon. D'accord. Balzamina ? Est ce qu'avant qu'on continue la visite je peux te confier quelque chose que j'aimerais garder autant que faire se peut secrète ?

Lisianthus sourit, lâchant un “YES!” de la victoire et envoyant un baiser volant à Paulia.

-Bien sur si ça peut t'aider, tu peux compter sur moi je t'écoute.

-Je suis accompagnée en permanence de Lisianthus. C'est un fantôme qui peut interagir avec moi, le seul que je vois. Ceux qui voient les fantômes le voient aussi, mais moi, c'est le seul.

-Tu peux lui dire bonjour de ma part aussi.

-Et il grinche parce que je veux pas te dire bonjour pour lui. Donc voilà. Il te dit bonjour.

Un instant l’infirmière resta silencieuse et puis elle se mit à rire. Oh. C’était pas vraiment la réaction attendue mais soit ? Lisianthus regarda la française avec un air goguenard. Paulia quand à elle la regarda sans comprendre.

-Excuse moi je ne m'attendais pas du tout à ça !

Généralement, les morts faisaient plus peur aux gens qu’autre chose, sa réaction était assez rafraichissante en tout cas. Balzamina sembla le chercher du regard un instant.


-Alors Bonjour Lisianthus, ravie de te rencontrer et merci beaucoup de me faire visiter aussi !

-De rien !

-Je comprend mieux les moments ou tu avait l'air ailleurs mais ne t'inquiète pas votre secret est bien gardé.

Paulia sourit, quelque peu soulagée. Elle avait l’air d’être vraiment… Bienveillante ? Elle chassa la petite voix (sa conscience pour une fois, et non une des voix des morts) qui la faisait encore douter, lui disant qu’il s’agissait peut être d’un stratagème et non de bonne foi. Elle poussa donc la porte de la serre et y entra.

-Il te dit de rien. Il est content. Et donc voici les serres de cours ! Y’a plusieurs climats dedans dans la partie botanique, là on est dans la partie culture.

Un petit chemin serpentait entre les monticules de plantes et, régulièrement, on pouvait voir une lanterne accrochée ou un arbre luminescent qui éclairait le chemin des visiteurs nocturnes.

-Faudrait qu’on y vienne plus souvent, c’est vraiment beau.

Elle posa sa main dans le dos de Lisianthus avec un sourire. C’est vrai que c’était plus simple quand les gens savaient qu’il était là, ça permettait… Plus d’échanges. C’était assez agréable.

Alors qu’ils déambulaient dans la serre le silence s’installa, intense. Il n’y avait personne à part eux trois dans les serres à cette heure-ci et sous l’immense dôme de verre on oubliait l’extérieur et son activité. Le calme de la nuit et la chaleur tropicale régnaient en maîtres absolus des lieux. Lisianthus flottait doucement à côté des vivantes en souriant. Tourné vers le dôme, il avait le regard perdu dans la contemplation des étoiles.

-Lui dis pas mais je me demande ce qui a poussé ses parents à partir tout de même. Cracher sur une sécurité pareille, c’est étonnant.

Paulia haussa les épaules. La question l'intéressait assez peu aussi elle ne cherchait pas plus loin. Enfin… En vérité, elle ne savait pas si c’était important ou pas, et elle espérait franchement que ça ne le soit pas. Partir d’une machine de mort pour se retrouver dans un endroit sécure avait déjà été suffisamment dur pour ne pas découvrir d’un coup d’un seul la dangerosité des lieux.

- Au fait Paulia, on m’a dit dans la journée qu’on allait devoir travailler ensemble de temps en temps. Tu t’occupe de la prévention des drogues à ce qu’on m’a dit ? J’ai consacré une partie de mes travaux personnels sur cette question l’année dernière. Alors je suis curieuse de savoir ce que tu fais déjà et surtout de savoir comment ça s’allie aux différentes magies des élèves. J’ai pleins d’idée mais on aura le temps d’en discuter !

Oulà ! Allait-on vraiment aborder ce sujet là, maintenant, à l’heure qu’il était ? Parce que parmi les sujets vastes, celui l’était particulièrement. En tout cas trop pour être discuté debout au milieu des plantes : quitte à en parler, autant être assis.

-Je te propose qu’on se trouve un coin pour s’asseoir et en discuter plus confortablement. Doit y avoir des bancs pas loin…

-Je te suis.

-Parfait, dit-elle en s’éloignant en direction du siège. Oui, effectivement, nous nous occupons de la prévention drogue et aussi du deal. Nous n’sommes pas les seuls, mais je suis la seule à avoir le “droit”. Je vends et en échange je fais en sorte que les élèves consomment dans de bonnes conditions. Aussi, comme on est pions pour le collège et le lycée on sait qui est mineur ou non et on vend qu’aux majeurs. C’est un des rares trucs où y’a une transaction pécuniaire au sein de l’école, moi ça me fait un peu des thunes et ça permets de limiter la consommation de certain. Je vend moins cher qu’en ville, comme ça c’est vers moi qu’ils viennent. Je deale pas de tout par contre… Et j’ai pas de tout en permanence.

Arrivée au niveau du banc, elle s’assit et s’étira dans un bâillement interminable.

-Quand aux différentes magies… Bah déjà ça dépends si c’est du matos magique ou non. Les effets sont vraiment variable mais c’est clair que chez les mages ça peut vite devenir incontrôlable si c’est fait n’importe comment, d’où mon indéniable utilité.

Balzamina semblait à son aise dans ce décors pourtant tout à fait nouveau pour elle.

- D’accord, dèjà je trouve ça incroyable et fabuleux que les jeunes puissent avoir une réelle aide d’adulte pour ça. Je respecte beaucoup ton travail et j’espère qu’on va pouvoir se compléter pour les aider. Je t’avoue que j’ai des idée d’ateliers ou de moments à mettre en place pour en parler avec les jeunes, notamment des risques et signaux à prendre en compte pour prévenir les dérive pour eux et leurs camarades mais gérer leurs magie face à cela m’inquiète un peu. Comme tu l’aura compris j’ai pas cotoyé beaucoup de mages dans ma vie. Je suis contente d’avoir un binôme, enfin un trinôme ?,accepte direct de prendre sa soirée pour me faire visité et faire connaissance.

-Ahaha je t’en prie ! C’est normal de prendre soins de ses nouveaux collègues ! On est dans un milieu fermé ici alors autant faire en sorte que les choses se passent bien sinon on est pas tirés. Quand aux atelier c’est effectivement une bonne idée. La gestion de la magie est complexe pour tout le monde et c’est un vrai travail d’adaptation permanent. Les contrecoups changent en fonction des gens, de leurs magies, de leur vécus… y’a pas de protocole d’action et quand on arrive pas à gérer faut souvent faire appel à quelqu’un qui a une magie adaptée à la situation pour compenser. Je sais pas si t’es déjà passée vers les classes d’aides, mais en cas de gros soucis avec un élèves c’est eux qu’on appelle. Si c‘est vraiment hors de contrôle, ils enverront Jean Delèze qui a une magie qui impose le calme aux gens autours de lui. Après, c’est rarement nécessaire.

Elle s’étira en baillant. La fatigue commençait à se faire sentir, peut-être était-il temps de rentrer.

-J’ai rendez vous avec Louise ce soir, on s’est pas vraiment donné d’horaire mais j’aimerais bien ne pas la rater.

-Pas de soucis. Balzamina, je pense qu’on va te laisser et rentrer chez nous. Tu retrouvera ton chemin ou tu veux de l’aide ?

- Tu as raison il commence à être tard. Je pense que je retrouverais la route ne vous inquiétez pas. Rentrez bien ! À bientôt.

Paulia lui sourit d’un air chaleureux.

-Toi aussi !

-Bonne nuit.

-Lisianthus te souhaite une bonne nuit. C’était vraiment un plaisir !

Elle se leva, retournant sur le chemin de la serre avec Lisianthus flottant à côté d’elle. Cette nuit, le fantôme devait croiser d’autres morts dans les couloirs et elle devait dormir, c’est donc d’un bon pas qu’ils retournèrent à l’appartement.

Quand ils furent arrivés et que Paulia fut dans son lit, Lisianthus passa le mur pour se retrouver dans le couloir, attendant la venue de Louise. Au bout du couloir, la forme spectrale de la jeune femme apparue mais, au lieu d’être seule elle était accompagnée par deux autres morts. Deux adultes au vêtements datant d’au moins soixante ans (l'âge exact était difficile à estimer).

-Salut Lou’ ! Ils viennent aussi jouer aux échecs ?

-Que neni l’ami. J’ai bien peur qu’ils ne se soient joint à moi pour une affaire bien plus importante. Ces deux jeunes gens se prénomment Pablo et Aymeric, tous deux souhaitent s’entretenir avec toi au sujet de Balzamina Dulac. Sais tu pourquoi elle est ici ?

Le blondin fronça les sourcils, méfiant. Pourquoi diable s’interessaient-ils à l’infirmière ?

-C’est une infirmière, elle est là pour soigner. Une infirmière quoi.

Louise leva un sourcil, se tournant vers les deux autres morts. Pablo répondit à sa question silencieuse d’une voix calme.

-Bah, c’qu’ya de sûr c’est qu’elle a pas de mauvaise intention envers la patronne sinon elle serait pas la. Et puis en soit, t’en fait tout un plat Aymeric mais si ça se trouve c’était rien du tout…

-Ils sont tout de même partit moins de 24 heure après l’incident. Nous n’avons certes pas tout les tenants et les aboutissant mais...

-Bon, quelqu’un veut bien m’expliquer ce qu’il se passe là ?!

Lisianthus perdait patience. Il n’avait pas l’impression de faire partie de la conversation et cela l’agaçait. Il était manifeste qu’il était question des parents de Balzamina mais ne pouvant rien comprendre d’autre qui soit constructif, ça ne lui plaisait pas du tout.

-Et bien… Le couple Dulac officiait ici en tant que médecins il y a de nombreuse années déjà, aux débuts de l’académie. Le sieur fut proche de nombre de défunts et l’amitié qu’il leur portait était réciproque c’est pourquoi leur départ inquiéta beaucoup d’entre nous tant il fut soudain. La cause nous est inconnue, ou du moins ses détails mais…

-Ils se sont violement pris le bec avec la directrice et sont partis moins de 24 heures après. On ne connaît pas le sujet de leur dispute, elle a eu lieu dans le bureau de la direction et même nous on ne peut pas y rentrer. Mais quand ils en sont sortis, ils étaient encore cramoisis de colère.

-Madame Dulac a même averti Kathleen qu’elle jouait avec le feu et que ça aurait des conséquences.

Lisianthus resta un instant muet puis reprit la parole.

-Vous pensez que Balzamina est en danger ?

-M’est d’avis qu’non. Ses vieux l’auraient pas laissé venir sinon, mais on s’demandait si elle était pas là pour mettre le bazar. Et ça, ça l’aurait mise dans la panade.

-Je ne pense pas. Elle ignore même pourquoi ses parents sont partis de Leoska.

-Ah. Ca vaut peut être mieux comme ça.

Dans la nuit résonna un appel auquel Pablo et Aymeric répondirent.

-Bon, on vous laisse à votre partie. A plus tard !

Il glissèrent hors du bâtiment laissant Lisianthus et Louise seuls. Lisianthus resta interdit un instant.
Qu’avait-il bien pu se passer pour qu’une telle dispute éclate ?