Août
2020.
Aux alentours de quatre heure du matin les cuisines sont, la plupart du temps, l'endroit le plus vide de l'académie. L'armé d'instrument de fer et de cuivre et les bataillon de four, frigo, plaques en tout genres semblent sommeiller dans une propreté parfaite. L’atmosphère calme des cuisine dégage une étrange expression d'irréalité comparé à son activité titanesque aux heures des repas. Véritable dragon ronflant, soufflant, aux milles et une mains pour nourrir la véritable fourmilière que représente Leoska. Un néon s'alluma en clignotant, puis les suivants, baignant la pièce d'une lumière froide et artificielle. Une porte s'ouvrit et un tête, puis un torse en sortires. Harold Andreatus inspectait la pièce.
Il n'était pas allé franchement dans les cuisines le dos raide, les talons de ses
Sergio Morreti vernis claquant sur le sol. Il s'en était approché avec discrétion, comme un élève en faute. Cette démarche, il ne l'avait pas eu depuis au moins vingt ans.
Après s'être assuré que la pièce était vide, l’enseignant poussa un soupir de soulagement et entra pour de bon. Ses habituels complets sombres avaient laissé place à un T-shirt bleu et un pantalon de toile écru. Il s'agissait des seuls vêtements "décontracté" que possédait le quarantenaire. Odette les avait qualifié de "Totalement non-assortis mais au moins ça change". Harold avait eu besoin ces derniers temps de ne pas se sentir engoncé dans ses costumes. Bien qu'il apprécie particulièrement la sensation d'être élégamment tiré à quatre épingle. Mais lorsque l'épingle en soit est plus grande que la clavicule... Ses costumes lui rappelait également un point important. Il allait devoir
redevenir un enseignant "potable" dans le mois prochain. Et cette sensation de repartir à zéro le terrifiait plus que tout. Mais chaques choses en son temps. Il n'était pas dans les cuisines en pleine nuit pour revoir sa pédagogie.
Harold avait continué à lire les revues de santé traitant de l'anorexie que lui prêtait Balzamina. Le sucre et la gentillesse de cette infirmière frolait le diabète. Harold chassa immédiatement cette pensée. Il devait à l'infirmière d'être rétablit en moins de trois mois. Elle s'était occupé de lui sans distinction aucune et sans prendre en compte le fait qu'il était un indicible connard. Il lui était redevable presque autant que Philo, presque autant que... Chaque choses en son temps.
Donc oui il avait continué à lire les articles traitant de l'anorexie. Et même si certains l'énervait ou le faisait carrément ricaner de sarcasme, les témoignages étaient parfois utiles. Notamment une adolescente ayant réussi à s'en sortir en créant elle même ce qu'elle mangeait. L'idée avait d'abord parue saugrenue au mage noir. Mais après un temps de réflexion il s'était mis à douter. Après tout... Manger le fruit de son travail devait avoir quelques chose de gratifiant. Il s'agissait peut être de la voix par laquelle "se nourrir" ne devenait plus une corvée déplaisante. De toute manière il fallait bien se forcer, le cathéter était plus déplaisant encore.
Le retour a l'aliment solide avait été rude. Depuis les crampes aux masticateurs jusqu'aux intestins hurlant de fureur et à l'estomac plus habitué à secréter des sucs afin d'éviter de se digérer lui même. Mais le plus dur avait sans doute été de conserver ses aliments. Le mental avait fait beaucoup. Allez savoir pourquoi une salade de lentille mangée chez son père était moins facilement rendue que deux bouchées de pâtes à l'infirmerie. Le mage noir y était encore en "observation". Il avait recréé un véritable petit chez soit dans un coin de la pièce. Mais depuis un retour de ses muscles principaux il effectuait des balades dans l'école. Allant parfois dans son bureau ou son appartement. Mais depuis plusieurs jours il s’interrogeait seul dans son grand lit blanc. Comment savoir si la technique marche sans essayer. Il avait tenté de se motiver en se disant qu'un de ses anciens élèves était sans doute membre de l'équipe de cuisine et que donc par conséquent il mangeait le fruit de son labeur. mais étant donné ses récents constats sur sa pédagogie il préférait éviter cette réflexion. Il était hors de question qu'il aille aux cuisines demander un petit coin de table pour faire sa popote de néophyte total... La honte aurait été trop grande. Ainsi le plan de s'y rendre de nuit avait germé.
Harold caressa du bout des doigts le marbre d'un plan de travail. Et maintenant? D'un mouvement lent il sorti de sa poche et déplia un petit bout de papier glacé découpé la veille dans un magazine santé. "Riz cuisson creole inratable. La recette du jour".
Il entrepris de sortir une casserole et de la remplir d'eau avant d'allumer une plaque à induction. Après un temps de réflexion il transvasa l'eau dans une bouilloire et attendit, lisant la suite de la recette.
Faire bouillir une grande quantité d'eau salée, jetez y un bouillon de votre choix. Je vais pas dévaliser la cuisine non plus... Du gros sel suffira. Un bruit aigu le fit sursauter. La bouilloire. Il versa l'eau chaude dans la casserole. Cherchant le gros sel dans les placards il se résigna a utiliser une grande salière fine de table posée dans un coin. Après un instant d'hésitation il ajouta du poivre, juste un peu. Le riz fut facile a trouver. La balance par contre... La cuisine était faite pour les grandes quantité. Il mesura donc une louche de riz. Après tout il allait gonfler.
remuer avec un écumoire jusqu'à ébullition. Mais ça boue déjà...Harold regarda l'immense écumoire de cantine posé dans un coin.
Tant pis...Après une dizaine de minute vérifiée à l'horloge, le quarantenaire éteignit la plaque et apporta la casserole jusqu’à un évier.
Et merde la passoire. Ils les rangent où?Plutôt que de perdre un temps fou à chercher la dite passoire, le mage eu une idée. Il alla chercher une chaise et se concentra. L'eau de la casserole disparut, laissant le riz au fond. Il transvasa méticuleusement dans une assiette le moindre grain de la piètre quantité qu'il venait de créer avant de poser une fourchette à coté.
Le résultat faisait peine à voir. Il tenta une bouchée et la recracha aussi tôt. Insipide, collant, trop peu salé. En enlevant l'eau magiquement il n'avait pas retiré l'amidon qui s'était colmaté en filme blanchâtre autour des grains trop cuits. Dépité il jeta le reste dans une poubelle et fit sa vaisselle. A son grand étonnement son estomac grogna. Ah oui... Les automatisme de l'organisme... Il venait de commencer à manger donc son estomac sécrétait. S'il voulait pouvoir dormir sans crampe d'estomac il allait devoir manger quelque chose.
Certaines personnes appelle cela la faim.
Connasse de faim.
Harold ouvrit un frigo au hasard et attrapa un dessert individuel. Il le fourra dans un micro-onde. Après une bonne minute il ressortit le fondant au chocolat et pris un petite bouchée.
Sa langue explosa sous le souvenir d'une saveur presque oubliée. Il dut se tenir au plan de travail, laissant tomber le gâteau. Il se souvenait de cette sensation.
C'est meilleur quand c'est chapardé le chocolat.Harold, Philo et deux autres enfants. Ils ont quatre ans pas plus mais comment obtenir plus de détails d'un souvenir aussi vieux? Seul une sensation de complicité et une joie décuplée de manger un gâteau au chocolat qui n'est pas censé être pour eux. Juste la joie de sentir sur sa langue le gout sucré et de sentir entre ses joues la pulpe mousseline du gâteau écrasé par les molaires, le cœur coulant faisant saliver et le tout descendant dans la gorge a la vitesse de mastications d'enfants.
Harold regarda le gâteau comme pétrifié alors que son cerveau bouillonnait à toute vitesse. Se nourrir passait par
manger. Pour survivre il fallait nécessairement que manger plaise. Hors pendant un temps bien trop long toute source de plaisir avait été bannie par Harold dans sa fausse rigueur mal orientée. Le voilà le problème. Ce n'était pas qu'il détestait ingurgiter, c'est qu'il s'interdisait d'aimer ça. D'un geste rageur, Harold ramassa le gâteau et fourra un gros morceau dans sa bouche avant de mâcher. Comme pour défier Harold Andreatus, le créateur de toute ses contraintes.
Quelques minutes plus tard la porte de l’appartement s'ouvrait en grand. Harold alluma la lumière et se précipita vers le mur nu sur sa gauche. Griffant le papier peint il réussit à en faire chuter une bonne partie. La fine couche d’aluminium posée ici dix ans plutôt était toujours là. Moqueuse. D'un coup de poing Harold traversa la plaque métallique et entrepris d'en arracher de grande poignée. Une fois un espace dégagé il s’engouffra dans la pièce derrière. Il alluma une ampoule qui grésilla, révélant une cuisine vide entièrement recouverte par la poussière. reculant quelques peut le quarantenaire s'affala dans son lit vide. Il y avait beaucoup de ménage a faire. Mais il était épuisé. Un coup de langue chassa un bout de gâteau de ses dents.
Chaque choses en son temps.