Mordred est né dans l’ouest de la France, dans une famille déjà composée de trois membres lors de sa naissance. Son père, sa mère et sa sœur aînée attendait joyeusement sa venue. Il n’y a pas grand-chose à dire sur cette famille moyenne que l’on peut trouver partout. Ils avaient une vie tranquille, une vie d’humains lambda éloignés de la magie. Mordred n’a jamais entendu parler de mages dans son arbre généalogique. Il n’y en avait pas, ou peu, si bien qu’on ne s’embarrassait pas à les protéger quand on en trouvait.  Il connaissait les rumeurs, les peurs de tous face à ces gens puissants. Comme eux, il ne voulait pas s'approcher de ce monde. Malheureusement pour lui, il en faisait partie. Il ne le sut pas d’un coup, car son pouvoir se manifestait trop subtilement pour qu’il en ait conscience.

Il ne sait pas exactement quand son pouvoir s’est déclenché, car c’est difficile de comprendre que l’on est à l’origine des hallucinations d’untel. Une fois, lorsqu’il avait 7 ans, un ami lui a dit voir exactement ce que Mordred imaginait. Celui-ci se dit simplement qu’ils étaient sur  la même longueur d’onde, si bien qu’ils allaient jusqu’à imaginer la même chose. Ce n’était pas le cas, son ami subissait une hallucination tandis que Mordred était simplement perdu dans ses pensées. Ce genre de chose arriva souvent, et la présence de Mordred finit par déclencher un léger malaise chez ceux qui le côtoyait souvent. Sa famille fut également touchée, sans que l’on fasse le lien avec lui. Sa mère plongea dans la folie à cause des hallucinations répétées que son fils envoyait sans en avoir conscience. Elles étaient légères, assez pour que sa descente soit longue et qu’un jour tout explose. Ce fut irrécupérable, son cerveau était trop endommagé.

La manifestation la plus flagrante survint lors d’un exposé au collège, en troisième. Il crut d’ailleurs que c’était la première véritable manifestation de son pouvoir, avant de faire le lien avec la maladie de sa mère et les réflexions de ses amis. Il présentait un livre et devait lire un passage choisi. Ce fut immédiatement bizarre. Les sons qu’il décrivait, les sensations, tout semblait sortir des pages. Alors, vinrent les personnages. Vinrent le feu et le loup. Tout prit vie, et la panique envahit la salle de classe. Ce fut le chaos, l’enseignante n’était d’aucune utilité. Personne ne comprenait qu’il s’agissait d’une hallucination collective, et tout le monde se rua dehors pour échapper aux flammes, aux chasseurs et au loup. Mordred était mortifié par la situation. Il avait fait ça. Comme il avait si souvent partagé son imagination, il l’avait projeté hors de lui pour la donner à voir à la classe entière.

Il savait ce qui l’attendait s’il ne faisait rien. Des histoires de mages qui finissent mal, on en racontait joyeusement à table lors des repas de famille. Il profita aussitôt du mouvement de foule pour fuir sans se faire repérer, il avait fait si peur à ses camarades que personne ne fit attention à lui. Par chance, cela prit tant de temps de calmer la panique des élèves et de la prof, qui s'étaient éparpillés partout, qu’on ne put pas l’attraper avant qu’il quitte l’établissement. A partir de là, ce fut très compliqué. Il ne pouvait pas rentrer chez lui, il devait se cacher. C’était impossible, tout semblait désespéré. Il n’avait rien sur lui mais il partit quand même. Sa vie était en jeu, il ne voulait pas finir dans une usine à mages. C'était un désastre, il ne savait plus qui il était et il devait fuir pour quelque chose qu’il n’avait jamais soupçonné. Il comprenait maintenant l’inconfort de certains, les remarques bizarres et délirantes. Sa mère.

Il n’eut pas d’autres choix que de développer son pouvoir pour survivre, les hallucinations pouvaient l’aider à aller plus loin, à obtenir ce qu’il voulait pour s’éloigner plus vite. Des contres-coups apparurent progressivement, plus violemment. Heureusement pas de manière permanente. L’hallucination qu’il avait jeté sur sa classe lui revint comme un coup de fouet, de manière distordue, peu de temps après l’accident. S’il avait toujours eu des migraines certainement causées par son pouvoir, il atteignit un stade supérieur avec cette hallucination. Il dut se cacher, souvent, mentir, tout le temps, et par dessus tout avancer. Il finit par entendre parler de Leoska, une soi-disant école pour mages. Si une telle chose existait vraiment,  comment se faisait-il que le reste de la population n’en sache rien ? Est-ce que ce n’était pas plutôt un piège, pour attraper les fuyards en son genre ? Il y alla quand même, c’était sa seule solution. La fuite n’en était pas une, il n’avait pas ce qu’il fallait pour survire.

Il arriva tant bien que mal à Leoska, où il put enfin faire le point sur sa condition tout en reprenant une vie « normale ». Il intégra le collège à partir du moment où il s’était arrêté et continua jusqu’à maintenant, en deuxième année de cursus supérieur.