Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Ces derniers temps, mon moral était au plus bas, sans savoir vraiment pourquoi. J'avais réussis à me faire quelques amis ici : d'abord des amis les plus improbables comme Messire Biskit le raton laveur ou encore ces dames les plantes, à qui je rendais régulièrement visite pour leur jouer un morceau. Puis ensuite étaient venus Eden et Sora, deux garçons formidables avec qui je m'étais tout de suite sentie à l'aise et avec qui je passais d'agréables moments, tant que ma magie se tenait tranquille. Mais cela ne semblait pas me suffire. Malgré tout cela, je me sentais toujours pas à ma place ici. J'étais tellement décalée par rapport au reste des élèves, de part mon éducation, mon vocabulaire et mon caractère. Je n'étais la fille enjouée que tout le monde appréciait en une seule seconde, ni celle qui sortait des blagues à tout bout de champs. Non, j'étais la petite fille modèle et coincé, celle qu'on évitait car trop différente.

J'avais toujours été seule toute mon enfance, aussi en avais-je l'habitude. Mais je ne sais pas, en arrivant ici, j'aurais espéré que cela change un peu. Et je savais bien que le problème ne venait pas des autres mais de moi. J'avais tendance instinctivement à me refermer sur moi même, à afficher cette image froide et droite, comme une carapace, ce qui n'aidait pas les autres à venir vers moi. Il n'y avait bien que ce coréen pour être assez têtu pour s'être ainsi accroché à moi. Peut être avait-il vu quelque chose en moi lors de notre première rencontre qui l'avait attiré ? Je ne serais le dire. Quant à Sora, je le sentais aussi seul que moi ces derniers temps. Ainsi on se tenait mutuellement compagnie. Et puis nos échanges avaient le don de me redonner le sourire, ce qui me faisait beaucoup de bien.

Mais là, en cette fin d'après midi, j'avais décidé d'être seule. J'avais encore très mal dormis cette nuit : le cauchemar qui m'avait réveillé avait été tellement affreux que je n'avais pas pus me rendormir. J'avais du tourner en rond pendant toute la nuit dans ma chambre, lisant et relisant mes cours et autres livres qui me passaient sous la main, ne pouvant fermer l'oeil. Aussi, le matin venu, j'étais exténuée. Eden me l'avait fait même remarqué lorsque nous nous étions retrouvé en cours, légèrement inquiet pour ma santé. Mais je l'avais renvoyé voir ailleurs, en lui disant sèchement que j'allais bien, alors que c'était clairement faux. Evidement, juste après, je m'en étais voulue et m'étais excusée auprès de lui. Mais il avait clairement compris que je ne voulais pas m'étaler dessus, aussi n'avait-il pas plus insisté.

Et puis évidement, nous avions eu cours de maitrise de la magie. J'avais essayé de m'appliquer du mieux que je pouvais mais soit je n'obtenais rien, n'osant pas faire appelle à la quantité de magie nécessaire pour l'exercice, soit et bien... j'en demandais trop. Parfois je comprenais pas : quand je faisais appelle à ma magie instinctivement pour amener un objet à moi sans réfléchir, cela se passait bien. C'est dès que je commençais à trop réfléchir, à essayer de comprendre et de ressentir les choses, c'est à ce moment là que cela tournait à la catastrophe. Pourtant j'y mettais vraiment du miens. Mais il fallait toujours que je rate tout ce que j'entreprenais. A croire qu'il fallait que j'arrête de réfléchir lorsque je faisais appelle à ma magie. Au moins, je me ferais moi mal à la tête et j'y arriverais tout autant, bien que sans comprendre pourquoi.

Voila pourquoi m'étais-je échouée sur ce banc, seule, assise au milieu de la cours, à regarder mes mains. Je ne voulais voir personne, ni n'avait envie de rien faire. Mon père et mon foyer me manquait cruellement et je ne pouvais m'empêcher de me demander s'il allait bien malgré mon absence et l'inquiétude à mon égard qui devait le ronger. J'étais partie comme une voleuse sans plus d'explication ce soir là et je m'en voulais terriblement. Après tout, il ne méritait pas cela. Je sortis alors son stylo, celui que j'avais faillit perdre le jour ou j'avais rencontré une rouquine du nom d'Astrid, et me mit à le regarder, nostalgique. Ce simple objet me rappelait tellement de choses : mon père évidement, mais aussi ma mère, ma vie antérieur, tout ce que j'avais perdue en la quittant aussi précipitamment pour sauver ma vie. Ma vie toujours aussi pathétique et misérable qui avait beau avoir changée du tout au tout, n'en était pas plus heureuse, malgré les dires et les efforts des deux jeunes hommes. Si seulement je n'étais pas née mage...

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Une voix légèrement familière m'interpella alors, me demandant comment j'allais. Je relevais la tête vers la personne qui venait de m'approcher : Monsieur Télesphore Archidice. Bonne ou mauvaise nouvelle, je ne serais le dire. Car après tout, ce professeur avait été des plus serviable et des plus sympathique lors de notre dernière rencontre. Mais il restait tout de même spécial, avec ses propres manières de parler et de se comporter. Et pour le moment, je n'avais pas très envie de voir quelqu'un. Je voulais juste être seule, me laisser aller à ma mélancolie et essayer d'oublier la journée abominable que je passais. Mais visiblement, l'homme voulait discuter avec moi, ayant surement vu ma petite mine abattue. Il allait falloir que je fasse plus attention les prochaines fois si je ne voulais pas attirer la pitié des gens.

Il me demanda alors comment ça avançait de mon côté depuis notre dernière rencontre. A vrai dire, pas fort. J'avais rencontré une fois le psy et honnêtement, tout recommencer de zéro, devoir de nouveau me livrer entièrement à un inconnu sur tout ce qui m'était arrivée jusqu'ici, c'était vraiment dur. Ma psy qui me suivait depuis quatre ans, à force, était devenue une amie et une confidente pour moi, j'avais l'habitude de me livrer à elle et puis elle m'avait suivit depuis l'incident, me prenant tout de suite en charge pendant que c'était encore frais dans ma tête. Alors que là, de devais tout ressasser ce qui était une vraie torture psychologique pour moi. Mais passons, je n'avais pas envie de repenser à cela. Quant aux cours de soutient, je n'en avais pas encore pris assez pour en voir les effets pour l'instant. Surtout au vu de la séance d'aujourd'hui.

Quant au fait qu'il me dérangeait ou non, oui il me dérangeait, mais j'étais trop bien élevée et trop gentille pour le lui dire. Après tout, il ne voulait que mon bien, pourquoi le rejeter ? Il n'avait rien fait d'autre que de s'inquiéter pour moi. Je ne pouvais pas rejeter sur lui toute ma frustration et ma fatigue de la journée. Il ne le méritait pas. Personne ne le méritait en vrai. Il fit ensuite un mélange de deux expressions désignant la même chose, à savoir avoir le moral dans les chaussettes et ne pas être dans son assiette, ce qui me rendu confuse pendant un instant, essayant de comprendre ce qu'il venait de me dire avant de faire les rapprochements et de comprendre. Et oui, effectivement, j'avais le moral au plus bas, bien vu. Cela se voyait tant que cela sur mon visage ? Il allait falloir que j'apprenne à mieux jouer la comédie alors.

- Bonjour Monsieur Archidice. Les choses se passent disons nous, j'ai commencé à voir le psychologue et à prendre des cours de soutient, ce qui m'aide énormément. Et pour cela je vous en remercie car c'est en grande partie grâce à vous. Et non, vous ne me dérangez aucunement.

Puis vient le moment de lui dire la vérité ou non à propos de mon moral. Je baissais les yeux, regardant un instant mon stylo, me demandant si je devais lui dire la vérité ou non. J'étais plutôt réservée de nature et n'aimait pas trop m'étaler, surtout devant un adulte. Mais je savais que Télesphore ne me jugerait aucunement, étant là pour aider les élèves plutôt qu'autre chose. Il avait des manières et des expressions bizarres, semblait semer facilement la confusion dans tous les esprits (pauvre Eden, je m'en souviendrais toujours), mais il semblait vraiment se soucier des autres. Je relevais alors les yeux vers lui.

- Non pas grand chose de spécial. Je soupirais. Juste mes problèmes personnels et mes difficultés en cours de pratique qui me plombent un peu le moral. Mais rien de bien dramatique, ça ira mieux demain. Mais vous, que faites vous par ici ?

Mon ton se voulait à la fois sincère et rassurant. Après tout, c'était l'entière vérité, bien que dite succinctement. Et puis cette petite question histoire de dériver sur autre chose, du grand Amicia Faversham qui veut fuir ses problèmes en s'intéressant plutôt aux autres. Mais ce changement de sujet avait au moins la fonction de mettre un terme aux questions à propos de cette situation dont je n'avais pas particulièrement envie de parler.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Le professeur me raconta alors qu'il comptait aller ranger ses affaires à son appartement d'une manière bien étonnante : en les balançant tout simplement. N'avait-il pas peur de les abimer en faisant cela ? Si visiblement. Mais alors pourquoi le faire ? Il m'avoua en plus que sa mallette contenant une maquette en papier d'un des bâtiments de l'école. Quoi ? Il avait sur lui une maquette en papier ? Elle devait alors être de petite taille pour être contenue par son sac. Mais tout de même, qui se promenait avec une maquette en papier dans ses affaires hormis lorsqu'on était architecte ? Cet homme m'étonnait et j'étais encore loin d'être au bout de mes surprises.

Il me parla ensuite de ses galères quand il lançait ses affaires et que son paquet de carte s'échappait. J'imaginais aisément la scène : Monsieur Archidice, se tenant à l'entrée de son appartement, balançant ses affaires sur le meuble le plus proche, sa mallette s'ouvrant en l'air et laissant s'échapper son précieux contenant, et en particulier son paquet de carte qui s'éparpillait alors autour de lui dans toute l'entrée. Cela devait être bien pénible ensuite à ranger, je devais le lui accorder. Mais tout de même, lorsque son sac contient des choses fragiles comme la maquette, ou facilement éparpillables comme les cartes, on prenait le soin de les ranger correctement, non ? Non visiblement. Je dois être la seule à faire cela alors.

Il me demanda alors si je voulais voir un tour de carte. Je me mis alors à réfléchir, ne sachant pas trop quoi répondre. Avais-je envie qu'il me fasse un petit tour de magie avec des cartes histoire de me concentrer sur autre chose et oublier mes problèmes ? C'était une solution comme une autre. Après tout, ça restait un divertissement et Télesphore était peut être très doué avec la magie, bien que j'y croyais moyennement. Je sentais encore l'embrouille quelque part. Cependant, avant que je ne puisse répondre un oui ou un non, il me dit alors qu'il avait plus d'"une" tour dans son sac avant de se pencher sur ce dernier. Oui, plus d'Une tour dans son sac, au sens littéral. Car à l'instant d'après, il venait de sortir de son bagage une tour d'ordinateur ainsi que la maquette de la tour Elizabeth, faisant partie du Parlement britannique et qui abritait nulle autre que la célèbre cloche nommée Big ben.

J'étais partagée entre le désespoir et l'amusement. Le désespoir car sa blague était vraiment nulle. Et l'amusement car je me demandais comment il faisait pour garder ce genre de chose dans son sac. A croire qu'il venait de me faire un tour de magie. Oui, en fait c'était cela ! Parce que clairement, cette tour d'ordinateur ne pouvait pas rentrer dans ce sac, c'était techniquement impossible. Il venait donc forcément de réaliser un petit tour de magie. Mine de rien, il était doué.

- Très réussit. Et je ne serais pas contre découvrir vos talents avec des cartes plutôt.

Et j'étais sincère. En quelques secondes, ce professeur venait de me faire oublier mes soucis, me permettant plutôt de me concentrer sur ses bizarreries et ses tours à la place. Et au final, il n'était peut être pas aussi mauvais que je le pensais initialement, il semblait même doué. Je pourrais peut être passer un moment agréable, voir amusant, à le voir jouer avec ses cartes devant moi, étalant sa sciences de la magie humaine. Cela me fera ainsi penser l'espace d'un instant à autre chose, me permettant de mettre entre parenthèse ma triste vie pour me focaliser sur un divertissement digne ce cher monsieur Archidice.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Oula, ça y est, c'est repartit, il faut que je mette en route mon traducteur à Télesphore. Donc fête devient tête, la dessus on est d'accord. Ca allait être long. Mais apparemment, il avait quelques tours de magie à me montrer, et cela semblait lui faire plaisir de m'exposer ses talents. Et de mon côté, j'étais plus intriguée qu'autre chose, ayant enfin trouvé une occupation pour ne plus penser à mes problèmes personnels. Je le vis sortir deux paquets de cartes de ses poches. Je ne pus m'empêcher alors de me demander ce qu'il comptait en faire. J'avais vu quelques tours de magie à la télévision mais jamais en vrai. C'était l'occasion de découvrir cela. N'empêche qu'elle ironie : une mage qui espère découvrir des tours de magie classique qui sont en fait plus des tours de passe passe. Mais c'est tout de même sympa à regarder.

Je suivis alors sagement les consignes du magicien, inspectant d'abord les paquets, puis en choisit un des deux pour mélanger comme je pus avec mes doigts délicats. Nous échangeâmes ensuite nos jeux, coupons en plein milieu, regardions chacun notre carte avant de la replacer dans le paquet puis de remélanger les cartes. Nous échangeâmes de nouveaux nos paquets avant de nous mettre à chercher notre carte au milieu des 63 autres présentent dans ce paquet. Et alors que je parcourais le miens, celui ci était bien trop épais pour mes mains délicate, et je fis alors tomber par inadvertance quelques cartes, que je rattrapais instinctivement au vol avec l'aide de ma magie pour les remettre rapidement dans le paquet. Je finis par retrouver ma carte et regarda Télesphore, attendant la suite des instructions.

Que ne fut pas ma surprise lorsque nous découvrîmes nos deux cartes isolées. Comment avions nous pu tomber sur la même carte ? Avons nous vraiment choisit la même carte ? Ou alors avait-il retrouvé ma carte dans le jeu que je venais de lui donner et prétendre qu'il avait choisit la même ? Il n'empêche que cette hypothèse était plausible, bien que je ne savais pas comment parmi les 64 cartes il aurait reconnut celle que j'avais choisis en particulier. Peut être avait-il mémoriser mes coupes ? Peu probable. Cela me laissa perplexe, j'aurais bien aimé connaitre son truc. Ou alors c'était un énorme coup de chance, mais voyez vous, je ne crois pas trop à la chance.

- Impressionnant ! Simple, facile à mettre en place mais efficace. Vous en connaissez combien des tours de magie comme celui ci ?

Je souris malgré moi, impressionnée par ses talents. Non je devais avouer que finalement, bien que ce fut ma politesse qui m'avait empêcher malgré moi de l'envoyer promener, j'avais bien fait car, bien que je ne l'affichais pas vraiment, je commençais réellement à m'amuser, de le voir ainsi étaler sa fausse magie malgré tout si impressionnante. Ca devait lui demander des heures de travail pour maitriser de tels tours de passe passe. Je me demandai où est-ce qu'il avait apprit tout cela. Et je voulais surtout en voir d'autres, pour concentrer mon esprit sur une chose aussi légère que celle la.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Je me doutais bien qu'avec les bons mouvements, on pouvait tromper n'importe quel oeil qui n'a pas l'habitude de voir ce qu'il faut voir. Ma mère m'avait dit une fois que pour faire de la bonne prestidigitation, il fallait détourner apprendre à détourner le regard du spectateur vers un point particulier ce qui permettait alors au magicien de faire la vraie manipulation à la vue de tous sans être découvert. La diversion était le point clé, voila pourquoi les magiciens en faisaient toujours autant des caisses lors de leur spectacle. Un simple spectateur pensait que c'était parce qu'il faisait son show, mais en vrai c'était simplement pour détourner l'attention. Si bien qu'un oeil exercé sait où regarder pour découvrir l'astuce, chose que bien sûr, je ne savais pas, n'ayant vu que très peu de prestidigitation.

Te donner une ombre... Mais oui bien sur ! J'ai envie de voir ça ! Comme dans Peter Pan, quand celui ci perd son ombre, et c'est Wendy qui la lui recoud après qu'il l'ai retrouvé dans sa chambre ? Ah... Les lapsus de ce cher professeur me feront toujours sourire. Oui, j'ai très bien compris que c'était nombre qu'il voulait employé, mais ça me faisait rire de le souligner. Bref, donc il connaissait beaucoup de tours de passe passe ? Voila qui est intéressant, j'avais envie d'en voir plus, histoire de passer cette fin d'après midi à me divertir sur autre chose.

- Oh ce serait avec grand plaisir d'en voir plus, mais en quoi vos possibilités sont limités ? Parce que nous sommes à l'extérieur assis sur un banc ?

- Exactement. Il n'y a pas de table pour poser les cartes, c'est pas pratique !

Une table ! Mais oui ! Evidement qu'il lui fallait une table ! Comment n'y avais-je pas pensé. C'était plus pratique si il pouvait avoir un support physique sur lequel poser ses cartes plutôt que du vide. Dommage, que nous n'en avions pas sous la main, j'aurais tellement aimé pourvoir voir bien plus de tours. Je posai alors les yeux sur mon sac. Mais si ! J'avais une solution pour lui trouver une table ! Bon, pas très grande, certes, mais elle fera probablement l'affaire pour un temps.

- Attendez voir, j'ai peut être ce qu'il vous faut

Je me penchais alors vers mon sac et en sortit un cahier, le plus grand que je possédait. Je ne sais pas si ça lui suffira mais je n'avais rien de plus plane ni de plus grand sous la main. A moins d'en mettre deux cote cote. J'en sortis alors un deuxième de la même taille. Puis je m'emparais d'eux avec la magie et les fit léviter devant nous. Je dus un instant me concentrer pour les mettre à la même hauteur l'un que l'autre et parfaitement collé. Mais une fois que les deux cahiers en position, je pus alors relâcher mon attention, bloquant mon pouvoir dans un coin de mon esprit et entretenant le lien en continue pour les maintenir un temps dans cette position. Je n'allais pas pouvoir tenir pendant des heures comme cela, mais assez de temps je pense pour qu'il puisse faire quelques tours.

- Cela vous convient-il ? Sinon pour en revenir à votre question, je pratique du violon, du piano et du chant sur mes temps libres, et ça a le don de me calmer en quelques minutes, me permettant de m'échapper un instant, emportée par la musique, et de penser à autre chose. J'en fais depuis que je suis toute petite et j'aime toujours autant en jouer.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

M. Archidice me parla alors de musique capable de provoquer les mêmes effets qu'une drogue, transportant l'esprit dans d'autres dimensions. Je n'avais jamais entendu parler de telles musiques. Il y avait bien cette fois, lors de ma rencontre avec le coréen, ou Eden nous avait littéralement transporté dans un autre univers grâce à sa magie pendant qu'on jouait - j'avais appris après coup qu'il était capable de provoquer des hallucinations. Mais voila, cette fois là, c'était grâce à la magie, pas à la mélodie elle même. Il m'arrivait parfois, lorsque je jouais, de m'imaginer des scènes dignes de films, me laissant guider par ce que la musique me faisait ressentir comme émotions : une musique épique me faisait m'imaginer que je me tenais au milieu d'un champ de bataille, une plus triste, que je devais alors me séparer d'un ami proche, ou encore une plus légère, que je me promenais au milieu d'un champ un jour d'été. Mais tout ça n'était du qu'à ma seule imagination. Tout de même ce qu'il venait de me dire m'intéressait, juste par simple curiosité.

Télesphore en revient alors à ma proposition de table, me demandant si ce n'était pas préférable de les poser sur le banc plutôt que de les maintenir en suspend ainsi par magie, ayant peur que je me fatigue très vite. C'est vrai que pour les maintenir ainsi parfaitement au même niveau, cela me demandait bien plus de concentration et de contrôle qu'en transportant librement un objet à côté de moi, laissant mon pouvoir faire sa petite vie. Aussi acceptai-je sa proposition de poser mes cahiers sur le banc pour éviter de me fatiguer outre mesure. J'aurais pensé qu'il aurait besoin d'une table à un niveau plus élevé mais si la hauteur du banc lui suffisait, ça me convenait tout à fait. Je posai alors mes deux cahiers sur le banc et coupai mon flux de magie. M. Archidice s'assit alors de l'autre côté du banc et entama un nouveau tour.

Il garda son paquet avec le dos bleu et commença à me faire choisir des cartes au hasard, les posant alors sur notre table improvisée. Je me laissai happer par le tour, essayant tout de même de voir ou il voulait en venir avec toutes ces manipulations. Ok j'en prends une puis je la remets dans le paquet avant d'en choisir une autre... Oui jusque là ça va, bien que je ne vois pas l'utilité de la manœuvre. Puis il me révéla que j'avais choisit les deux seules cartes rouges du paquet. Comment ça les deux seules cartes rouges ? Il me montra alors le dos des deux cartes qui n'était plus bleu mais bien rouge. Je fus alors grandement étonnée, comment est-ce possible ? Bon, on va dire coup de chance bien que je n'y crois pas. Puis il tapota son paquet sur les deux cartes rouges et me dévoila que tout le jeu de carte bleu avait été remplacé par le rouge. Je regardai les cartes avec de grands yeux, stupéfaite. Comment avait-il fait ?

- Mais, comment ?

Je me permis alors de prendre le jeu de carte, observant une à une les premiers cartes ainsi que la dame de carreau, essayant de comprendre. Les bleues n'avaient pas pu disparaitre, il les avait forcément interverties à un moment dans le processus. Il n'empêche que c'était bluffant, surtout que ces cartes semblaient tout à fait normales. Mais alors où étaient passées les bleues ? Dans ses grandes manches probablement. Il n'y avait que là qu'elles pouvaient être. Je comprenais mieux pourquoi il portait de tels habits à présent. Mais pas question que je quitte mes jolies robes. Et de tout manière, si je me ramenais comme cela en cours et non en uniforme, j'allais me faire réprimander. Donc on oublie l'idée. Si je voulais me mettre à la prestidigitation, il allait falloir trouver autre chose pour dissimuler les éléments.

- Vous avez du talent, c'est indéniable. Personnellement, tout ce que j'arrive à faire avec des cartes c'est de les mélanger et de jouer au solitaire ou au rami.

Dit comme cela, ma vie semblait tellement triste. Mais c'était la vérité : les seul jeux de cartes que je connaissais était le solitaire et le rami, étant les deux seuls jeux que j'avais pu expérimenter seule ou avec ma mère lorsqu'elle était encore de ce monde. Je n'avais jamais eu un groupe d'amis pour faire une belote, un tarot ou un kems. J'espérais un jour pouvoir découvrir cela en me faisant des amis ici, mais j'allais d'abord devoir arriver à m'intégrer plus que cela. Mais je savais que cette école m'ouvrait de nouvelles possibilités sur le côté social, des possibilités que je n'avais jamais eu avant à cause de mon père. Et cela me redonnait espoir de connaitre enfin une vie dite normale, bien que rien ne semblait normale dans cette école.

- Avez vous des tours encore plus complexes ? De la grande prestidigitation avec des cartes ? Ou avec tout autre objet que vous conserveriez dans votre précieuse mallette ?

Je voulais en voir plus encore, mon esprit enfin totalement focalisé sur ce qui se passait ici, mes problèmes profondément enfoncé dans mon subconscient. Ils reviendront à la surface, c'est indéniable. Mais maintenant que je pouvais enfin profiter d'un peu de paix et de sérénité grâce à ce mage déjanté, je voulais en profiter. Les traits de mon visage se détendirent un sourire commençait à apparaitre. Finalement, ces tours de magie, c'était exactement ce qu'il me fallait pour me détendre, encore plus efficace que le violon, possiblement parce qu'en plus j'avais le droit à un contact humain avec, ce qui réchauffait mon petit coeur meurtrit.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Archidice me demanda comment je mélangeais mes cartes. Je regardai alors celles que je tenais dans mes mains, légèrement surprise de sa question. Comment est-ce que je mélangeais mes cartes ? Et bien de manière classique au final, je n'avais pas de manière particulière de mélanger mes cartes, enfin il me semblait. Je le vis alors sortir un autre paquet de ses poches, me laissant l'autre pour que je puisse jouer avec. Alors que je commençais à les mélanger machinalement, il finit par me répondre concernant sa mallette. Visiblement, celle ci contenait que des papiers. Je décidai de le croire sur parole.

Pendant qu'il préparait son tour suivant en mélangeant ses cartes, je m'amusai avec les miennes, m'emparant d'elles mentalement pour les faires passer d'une main à une autre sous forme de cascade très régulière : on aurait presque pus croire à un accordéon. Voila un côté pratique à mon pouvoir, il me permettait de manipuler les objets de manière non conventionnelles, défiant les lois de la physique. Puis le professeur fut enfin prêt pour me montrer son tour suivant. J'arrêtais alors de jouer avec mes cartes mais les gardais en main, notre table étant trop petite pour que je puisse les poser dessus sans déranger le magicien.

Il avait séparé les cartes en deux tas et s'emparait des deux premières cartes, n'en retournant qu'une et me demandant si il devait les mettre de côté ou non. Je lui répondis alors de manières aléatoire, me demandant à quoi servait tout ce charabia. Une fois toutes les paires triées, il me révéla d'abord celles qui étaient devant nous, mais aucune paire ne correspondait. Puis il récupéra celles que nous avions mit de côté et me révéla que chaque couple de carte correspondait à une paire. Je le regardai, légèrement ébahit. Il était fort, vraiment très fort. Surtout que là, je séchais vraiment pour trouver l'astuce. Surtout que c'était moi qui avait désigné lesquelles mettre de côté, pas lui.

- Bluffant... Félicitation M. Archidice, vous êtes décidément le meilleur dans ce domaine.

Il m'annonça alors qu'il allait me montrer les apparition et disparition d'objet dont il maitrisait visiblement les secrets. Je le vis alors faire apparaitre des pièces entre ses doigts, puis des objets de plus en plus gros, de toutes formes et de toutes tailles. Je le regardai, impressionnée et ravis, un sourire s'affichant peu à peu sur mon visage à mesure qu'il m'émerveillait par son talent. Il était impressionnant, vraiment impressionnant. Je ne savais plus combien de temps ça faisait que nous discutions tous les deux, j'avais l'impression que ça ne faisait que 10 minutes, mais j'étais loin de me douter que ce professeur atypique pourrait ainsi me divertir et me remonter le moral.

- Je dois avouer que c'est très impressionnant ! Je suis impressionnée. Mais où cachez vous tous ces objets ? Dans vos longues manches ?

Bien que vu la taille de certains objets, je doutais qu'il puisse les stocker dans ses manches. Mais alors où pouvait il bien les ranger ? A moins qu'il n'ait un réel pouvoir pour matérialiser et dématérialiser des objets, mais je soupçonnais que ce ne soit pas ça, du moins je l'espérais, voulant croire vraiment en son talent.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

M. Archidice me confirma que c'était ce qu'il y avait de plus probable, que les objets soient cachés dans ses manches. Mais au ton de sa voix, je me doutais qu'il n'y avait pas que là qu'il en cachait. Mais alors où ? Dans les plis de son manteau ? Dans de grandes poches ? Attendez... que fait-il ? D'ou viennent ces drapeaux qui sortent de son oreille ? Non parce qu'on va pas me faire croire qu'il les a rangé dans son oreille, je ne le croirais pas. En tout cas, comme il le disait, il en trouvait visiblement de partout, ce qui me fit sourire.

Je le vis alors se pencher vers le dossier du banc, les manches bien dégagées et revenir vers moi avec un chapeau. Je le regardai, étonnée. Depuis quand il y a un chapeau de posé sur ce banc ? Pendant tous nos échanges je ne l'avais pas vu déposer quelque chose derrière moi. Il devait donc l'avoir fait apparaitre à l'instant, mais comment ? Je devais arrêter de me prendre la tête et de me laisser bercer les illusions, et juste m'émerveiller comme une enfant face à la magie de ces tours.

Je me retrouvai ensuite avec le chapeau dans les mains. Je le regardai sous toutes ses coutures, me demandant quoi en faire. Surtout qu'il venait de passer à autre chose, retournant à apparaitre d'autres objets pour faire grossir son tas qui se formait sur mes cahiers. Il me prit alors l'envie de vouloir jouer avec. Je m'emparais mentalement du chapeau tout en le gardant en main. Je le lançais alors en l'air et le rattrapai sans effort, contrôlant sa direction. Puis, je le relançais de nouveau en l'air pour le faire tomber sur mon index levé et le faire tourner sur lui même au bout de mon doigt, à la manière des basketteurs s'amusant avec un ballon. Puis je le relançais de nouveau en l'air et le fit atterrir sur ma tête. Au moment ou le chapeau toucha mon crâne, je le saisis par le rebord et baissant la tête en même temps, saluant ainsi mon seul public. Puis j'enlevai le chapeau de ma tête d'un mouvement fluide et le tendis vers Télesphore, tout en relevant la tête, un sourire amusé aux lèvres.

- Je confirme, celui-ci est bien vide.

Voila que je commençais à me libérer beaucoup plus que je ne l'imaginais. L'image de la petite fille modèle commençait à s'effacer. Cette école malgré tout me transformait, pour le bien ou pour le pire je ne saurais le dire, mais en tout cas je commençais à m'ouvrir plus aux autres et à oser certaines choses que mon éducation m'aurait interdites. Chez mon père, jamais je n'aurais pu ainsi m'amuser avec un chapeau. J'aurais du me contenter simplement de regarder celui ci avec délicatesse avant de le rendre à son propriétaire avec élégance, grâce et charme, un sourire faux aux lèvres. Mais en cet instant, je me sentais vraiment moi-même. Je n'avais que 18 ans, j'étais encore jeune et j'avais besoin de m'amuser, de me comporter comme une jeune de mon âge, d'avoir une vie comme tout le monde. Mon sourire était donc sincère et vrai, m'amusant réellement grâce à l'aide du magicien. Et cela me réchauffait le coeur.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Le sourire du professeur au moment ou je finissait mon petit numéro me réchauffa le coeur. Visiblement, j'avais réussi à l'amuser avec mon envie soudaine de faire n'importe quoi. Au moins, il n'y avait pas que moi qui m'amusait ici. Il se mit alors à m'applaudir en faisant jaillir des paillettes de ces mains à chaque fois qu'elles s'entrechoquaient. Cela m'émerveilla autant que ça m'amusa. Des paillettes se déposèrent alors sur mes cahiers et les différents objets posés dessus, mais aussi sur ma robe et quelques unes dans mes cheveux, soufflées par le vent. Super, me voila couverte de paillettes qui allaient être galères à enlever sous la douche. Mais tant pis, c'était tout de même très amusant.

Il se débrassa des paillettes qui lui collaient aux mains avant de récupérer le chapeau pour le manipuler un instant, se demandant s'il n'y avait pas un objet de coincé au fond. Après plusieurs mouvements et tours de passe passe, il en sortit alors une lampe de jardin en forme de fleur, qui semblaient fonctionner grâce à l'énergie solaire. Je haussais un sourcil, surprise avant de sourire, amusé. Mais où trouvait-il de tels objets, tous aussi incongrus les uns que les autres ? Il me tendit alors la lampe, m'expliquant qu'il en avait pleins d'autres et qu'elle me serait probablement utile si jamais je sortais la nuit.

Effectivement, j'avais tendance lorsque mes insomnies persistaient de sortir dehors pour m'aérer l'esprit. Mais pour cela, j'avais déjà une lampe de poche bien plus discrète que cette grosse lampe de jardin. Il n'empêche que l'attention était tout de même touchante et je ne pouvais refuser ce cadeau. Voulant continuer de jouer, je sortis alors mon meilleur jeu d'actrice, prenant cette lampe pour un véritable bouquet de fleur qu'un potentiel amant m'offrait, affichant une moue légèrement gênée, un fin sourire aux lèvres, rougissant légèrement. Je saisit alors la lampe entre mes mains puis fit semblant de respirer l'odeur de la fleur avant de relever mes yeux bleus vers Télesphore, remettant une mèche de cheveux en place.

- Il ne fallait pas voyons, vous me flattez.

Puis mon sourire s'élargit, se transformant alors en un petite rire, amusée par ma propre prestation. Ce que je pouvais être parfois stupide mais j'adorais le théâtre et je trouvais toujours le moyen de faire une scène, surtout dans ce genre de situation. Je finis alors par totalement sortir de mon rôle en retrouvant une expression corporelle plus neutre sans que mon sourire ne disparaisse.

- Mis à part cela, merci beaucoup, elle me sera sans doute très utile. Au moins elle décorera ma chambre.

Parce qu'il fallait avouer que pour l'instant ma chambre était très austère, n'ayant rien pus emmener avec moi hormis des vêtements, de l'argent, mon ordinateur portable, des photos de ma mère dont l'une encadrée, et surtout mon violon. Alors un peu de décoration était toujours la bienvenue pour que je puisse enfin me sentir plus à l'aise dans celle-ci.

- En tout cas, je vous remercie, ces quelques tours m'ont grandement divertis et m'ont redonné le moral. Il faudrait que vous m'en appreniez quelques uns un jour, je suis curieuses de connaitre certaines de vos astuces.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Je remarquai que mon petit jeu de rôle n'avait pas eu l'effet escompté. Ok, note à moi même : plus jamais faire appelle au théâtre avec M. Archidice. Visiblement, il ne comprenait pas cette subtilité, probablement à cause de notre grand écart d'âge. Je réserverais cela à mes amis, ça vaudra mieux, quoi que même avec eux je serais capable de n'obtenir d'eux que de l'incompréhension. Suis-je une si mauvaise actrice que cela ? Ou au contraire une si bonne actrice qu'on pense que ce que je joue est réellement ce que je pense ? Peut être, je ne le saurais jamais pour le moment.

Il passa alors sur ma demande, me répondant que d'habitude, il ne divulguait jamais ses secrets. J'en fus légèrement attristée, moi qui aurait aimé apprendre un ou deux petits tours faciles histoire d'amuser mes amis. Bon pas Sora parce que avec son handicape, ça allait être difficile de le berner puisqu'à part me croire sur parole si je lui dis que je tiens un 7 de carreau dans les mains, et bien il ne peut pas vérifier par lui même. Mais ça serait amusant de le faire avec Eden. Je suis sûre qu'il ne s'attendrait pas à ça de ma part. Mais visiblement, et bien la prestidigitation, ça attendra plus tard.

Télesphore me fit alors remarquer toutes les paillettes qui s'étaient amassées sur mes cahiers. Comme il le soulignait, ce n'était pas trop mon style de me ramener avec des cahiers couverts de paillettes en cours. Le coréen allait surement me poser des questions à propos de ces paillettes et ne me croirait pas quand je lui raconterai cette journée là. Ou alors si, mais il continuerait de dire que cette école est bizarre, ne renfermant que des gens bizarre dans un pays de fou. Et la dessus, il n'a pas toujours tors, bien que je trouve de mon côté cette école fascinante et les gens qui l'habitent encore plus. Tous avaient leur charme et leur particularités qui me faisaient certes pas me sentir à ma place, mais en même temps qui me changeaient tellement de mon ancienne vie, m'apprenant à m'ouvrir et à connaitre le monde extérieur.

- Ne vous inquiétez pas pour les paillettes, j'ai un don utile pour les faire partir. J'arriverais bien à m'en débarrasser peu à peu.

Je ne pourrais pas m'emparer des toutes les paillettes en même temps. Mais avec du temps et de la persévérance, j'arriverai peut être peu à peu à les enlever une par une, au moins les plus récalcitrantes. Et ça me permettra de m'entrainer au contrôle de ma magie en dehors des cours. En résumé, j'étais sûre de pouvoir trouver une utilité à ses paillettes pour le moins envahissante.

Le professeur finit alors par me demander ce que je voulais apprendre, soulignant tout de même qu'il ne m'apprendrait pas tous ses tours. Je n'avais évidement pas la prétention de vouloir tous les connaitre et ça ne m'intéressais pas. Mais en connaitre deux-trois, simples à exécuter, qui avaient leur petit effet me comblerait entièrement. Un sourire se dessina alors sur mon visage alors que je lui répondais, enthousiaste :

- Deux ou trois petits tours avec des cartes me conviendront parfaitement, les plus simples et les plus faciles à mettre en place, car après tout je débute. C'est juste histoire de pouvoir m'amuser un peu avec mes amis. Et bien sûr, je garderais secret vos petites astuces.

J'avais tellement hâte de commencer. Même un seul tour me suffirait en réalité. Ce n'était que l'idée d'apprendre autre chose que des mathématiques ou de l'histoire, qui plus est une activité manuelle et divertissante, qui me mettait dans cet état. J'étais encore jeune et évidement naïve après avoir passé tant de temps enfermée, seule. Peut être que la prestidigitation ne marchait que sur les enfants. Mais moi, ça m'émerveillait autant que n'importe qu'elle réelle magie présente dans cette école. Je voulais en apprendre et en découvrir plus. Et peut être avais-je un petit don pour la prestidigitation, qui sait ?

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Télesphore commença alors par me montrer un petit tour tout simple ou il suffisait de choisir une carte dans le paquet puis la remettre dedans avant que le magicien ne la retrouve parmi les autres. Simple comme bonjour et efficace comme pas deux. Mais encore fallait il retrouvé la carte. J'observai chacun de ses mouvements et essayait de comprendre le truc, à quel moment il repérait la position de la carte. Je savais qu'avec une simple coupe, l'ordre de celles ci ne changeait pas. Ils devaient donc s'appuyer la dessus mais comment ?

Puis le magicien m'expliqua alors qu'il suffisait de regarder la carte du dessous au moment ou la personne nous rend le paquet de carte une fois mélanger car, vu que l'on pose sa carte sur le sommet du paquet, au moment de la coupe, la carte du dessous va alors se retrouver sur la première carte du paquet, à savoir la carte choisis. Mais oui, maintenant qu'il le disait, c'était évident ! Pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt ? C'était mathématique, de la pure logique et tellement indéniable quand on connaissait la solution.

- Oui je pense avoir tout compris. La carte du dessous du paquet indique la position de celle du dessus après la coupe effectuée. Simple, encore fallait-il y penser.

Bon maintenant reste à savoir comment regarder cette carte du dessous discrètement. Lorsqu'on avait l'habitude, on savait comment faire mais en tant que novice, il allait falloir que je trouve une technique discrète et imparable mais qui n'éveille pas les soupçons. Je pris alors le paquet et commençais déjà à réfléchir à comment faire, le retournant dans tous les sens, testant plusieurs approches. Alors au moment ou je le saisis, si je le laisse comme cela, ça ne marche pas... Si je le tourne... ouais pourquoi pas... En l'inclinant ainsi, non trop voyant. Ca y est j'ai trouvé ! Au moment de récupérer de le paquet, il suffit que je place ma droite sous le paquet et que je le tourne sur le cote, prétextant de réaligner parfaitement les cartes pour jeter un coup d'oeil entre mes doigts pour voir la carte. Simple, naturel et efficace, éveillant peu les soupçons.

- Ok, je suis prête, allons y.

Je commençais alors par mélanger les cartes puis d'un mouvement gracile, essayant de bien garder toutes les cartes entre mes doigts délicats, je demandai à M. Archidice de choisir une carte puis de la poser sur le cahier, accompagnant ma demande d'un sourire. J'essayai de paraitre la plus naturelle et la plus à l'aise possible, bien que je devais me concentrer un maximum pour ne rien rater. N'empêche que mes cours de théâtre me servait enfin, j'arrivai à rentrer dans mon rôle de prestidigitatrice avec aisance, comme si j'avais fait cela des années alors que pas du tout.

Je lui demandai ensuite de mélanger les cartes et patienta un instant, observant ses doigts agiles mélanger les cartes. Puis il me rendit le paquet. Je fis alors ma petite astuce pour voir la carte du dessous tout en réalignant parfaitement les cartes du paquet. Je ne posai mes yeux sur les cartes à peine une demi seconde, le temps de capter la carte, avant de reposer mon regard sur Télesphore, continuant d'appuyer sur les bords du jeu de carte pour noyer le poisson. Puis je le posai sur notre table de fortune et posai ensuite sa carte sur le dessus, alignant de nouveau parfaitement les bords, comme si j'étais une maniaque. Puis je lui proposai de couper le paquet en deux avant de le récupérer. Je finis alors par étaler les cartes devant nous.

- Et donc si j'ai bien vu de mes yeux clairs, votre carte est... celle ci ?

Je sortis alors la bonne carte du paquet, affichant un sourire satisfait. Simple comme bonjour. Mais est-ce que ma petite astuce était si flagrante que cela ? Je n'en savais rien. Je pense que pour quelqu'un d'aguerrit, elle l'était, car il savait ce qu'il devait chercher. Mais pour quelqu'un qui n'y connaissait rien... Peut-être pas tant que cela. Du moins je l'espérais. De toute manière, je ne pourrais le savoir qu'en le faisant sur mes amis, je n'avais pas d'autres choix.

- Qu'en avez-vous pensé ? Etait-ce bien pour une première fois ?

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Ce n'est qu'au moment ou il posa son papier sur le cahier pour m'applaudir que je remarquai que depuis tout à l'heure il faisait des origamis, un renard en l'occurrence. Très joli et très raffiné. Enfin un art que je n'avais jamais prit le temps d'apprendre, trop occupé par ma musique. J'en avais déjà fait avec ma mère, lors d'après-midi ensoleillés, lorsque nous ne savions pas quoi faire. Nous prenions alors des feuilles de brouillon dans le bureau de mon père et nous nous installions sur la terrasse avec un grand verre d'eau. Et nous passions ainsi des heures, au soleil - sans oublier d'avoir mit avant une tonne de crème solaire sur ma peau fragile - à faire des origamis. A l'époque, je n'avais su faire que des choses grossières mais que ma mère trouvait toujours très jolies. Mais après son départ, je n'avais pas continué, comme tant d'autres choses, n'ayant plus la volonté de le faire.

Les paroles de Télesphore m'arrachèrent à mon souvenir de ces jours heureux et je concentrai de nouveau toute mon attention sur lui. Il me félicita pour cette première réussite, qualifiant ma petite astuce d'ingénieuse, ce qui m'arracha un sourire, plutôt fière de moi. Comme il le souligna si bizarrement (rouille ? ne voulait-il pas dire plutôt peu ? Passons) cela restait voyant pour un oeil exercé, et j'étais d'accord avec lui. Mais en si peu de temps, c'est tout ce que j'avais trouvé comme astuce. Avec du temps et plus de réflexion, je pouvais sans doute faire mieux.

Le médiateur sortit alors un autre jeu de carte et me montra une technique plus discrète en se basant sur mon idée, plaçant sa seconde main d'une autre manière histoire de plus cacher la chose. Pendant qu'il me montrait tout en m'expliquant à l'oral, j'essayai de reproduire ses gestes, me concentrant sur ses mains habiles. Cela se voyait qu'il faisait cela depuis des années, vu la dextérité avec laquelle il exécutait ses mouvements. J'allais devoir m'entrainer pendant encore des mois pour y arriver aussi bien. Mais l'entrainement et la pratique, il n'y a que ça de vrai, en tout cas chez moi. Je n'étais pas une surdouée à qui tout réussissait au premier coup. Mon talent, je le devais à ma patience et mon dévouement pour apprendre les gestes peu à peu.

Il me proposa alors de le refaire pour m'exercer. Parfait, recommençons en sortant le meilleur de nous même. Je refis plusieurs fois encore le mouvement pour être sûre de le maitriser totalement et d'avoir bien compris l'enchainement.

- Très bien, allons y en espérant que j'ai bien tout saisit.

Je repris alors tout depuis le début. L'ayant déjà fait une première fois, je me sentis donc tout de suite plus à l'aise aussi bien dans mes gestes que dans mon léger jeu d'actrice. Je n'en faisais pas des caisses, juste ce qu'il fallait pour essayer de rendre le tour divertissant, m'exprimant de manière naturelle et enjouée, me prenant vraiment au jeu. Au final, c'était vraiment divertissant de présenter un tour, tout autant que d'en regarder un. Je comprenais pourquoi M. Archidice adorait autant faire de la prestidigitation. Je ne ferais clairement pas ça toute ma vie mais de temps en temps, il fallait avouer que c'était amusant.

Sur la fin, après avoir étaler les quêtes, j'en rajouta même une couche, me sentant en confiance. Je voulais faire semblant que je pouvais entendre les pensées de la personne et deviner ainsi sa carte.

- Bien ! Voyons si à présent je suis en mesure de retrouver votre carte. Il va falloir pour cela que je lise dans vos pensées. Pensez clairement à votre carte je vous prie.

Je fermais alors les yeux, relevant la tête et fit parcourir ma main au dessus des cartes sans les toucher, agitant mes doigts graciles, pianotant l'air, comme si je recevait ainsi mieux les ondes. Puis ma main se stoppa et j'ouvris les yeux, fixant les cartes. Je saisis alors la carte juste à côté de la carte du dessous.

- Je vous ai clairement entendu et je peux dire sans difficulté que votre carte est le 5 de trèfle, conclus-je en lui montrant la carte sélectionnée.

Un sourire s'afficha sur mon visage, satisfaite de ma petite prestation. Je sais que cette fin était un peu too much, mais je trouvais cela plus amusant comme cela. J'avais vu quelques magiciens faire ainsi lors de leurs spectacles et sur le coup, ça m'avait un peu agacé car ils en faisant trop. Mais en vrai, maintenant que je le faisais moi même, je trouvais cela bien plus divertissant ainsi et je comprenais enfin pourquoi ils le faisaient. Après tout, la prestidigitation restait un divertissement. Autant rendre cela le plus amusant possible.

- Et voila ! A ce rythme, je vais devenir un vraie magicienne.

Choisis une carte, n'importe laquelle.

ft Télesphore 

Visiblement, M. Archidice avait apprécié ma prestation, me complimentant même sur ma fin improvisé. Bon par contre, plus ça allait, et plus il se mélangeait dans ses mots, si bien que mon traducteur interne tournait à plein régime pour essayer de le comprendre. Pas toujours évident parfois de le suivre, mais il fallait avouer que je commençais de plus en plus à l'apprécier, ce professeur haut en couleur. Au moins, je devais lui reconnaitre qu'il m'avait redonné le sourire pour aujourd'hui. Et cette petite initiation à la magie fut des plus plaisante pour moi, me sentant soudain plus habile de mes dix petits doigts dans un domaine que je ne pensais jamais aborder.

Il me demanda alors si j'allais mieux et je lui répondis avec un sourire qu'effectivement, grâce à lui, j'avais retrouvé le moral et l'en remerciai pour cela. Puis il dut prendre congé. C'est vrai que je l'avais déjà retenu pas mal de temps et qu'il devait surement avoir fort à faire. Ah non au final, sa routine. Mais tout de même, moi aussi j'avais des choses à faire comme réviser et aller faire du violon. Oh non ce soir ça allait être chant, me sentant d'humeur bien plus joyeuse. J'irais faire quelques gammes sur le piano pour m'échauffer la voix puis après qui sait ce que je chanterais, seule dans la salle de musique... Peut être mes partitions les plus compliquées. Tiens oui, bonne idée ! Allons fait du chant d'opéra !

Je saluai alors le professeur, le remerciant encore pour tout. Bon, je n'avais plus qu'à ranger mes affaires. J'époussetais au mieux mes deux cahiers avant de les ranger dans mon sac. Il y aurait un peu de paillettes dedans mais tant pis. J'y rangeai également la lampe fleur et... oh ! Il avait oublié un de ses jeux de cartes ! Ah moins qu'il ne me l'ait laissé volontairement pour que je puisse m'entrainer. Ne sachant pas si c'était involontaire ou non, je décidai de le garder avec moi : je le lui rendrais la prochaine fois que nous nous croiserions. D'ici là, j'essayerai de mettre au point notre petit tour de magie en y ajoutant plus de grandiose avec l'aide de ma télékinésie par exemple.

Une fois toutes mes affaires rangées dans mon sac, je me levais finalement de se banc sur lequel j'étais assise depuis bien trop longtemps, les muscles de mes jambes et de mes fesses endoloris et protestant sous l'effort. Je pris alors la direction de ma chambre, un sourire aux lèvres. Quand j'allais raconter tout cela à Eden... Oh non justement, j'allais d'abord le surprendre avec mon petit tour de magie avant de lui raconter cette jolie histoire. Ca serait bien mieux dans cet ordre là. J'avais trop hâte de voir sa tête n'empêche, il allait encore se demander d'où est-ce que je sortais.